Le fiasco couve. Moins de cinq heures après avoir obtenu une première victoire judiciaire – un tribunal de Madrid a interdit à l’UEFA et à la Fifa toute mesure contre la Super Ligue – le consortium de gros clubs européens, à l’origine du projet de Super ligue européenne privée, est en train d’essuyer plusieurs gros désistements dans ses rangs.
Le président de l’UEFA Aleksander Ceferin s’est dit «ravi» de voir les Citizens renoncer au projet, qui menace le football européen d’implosion depuis dimanche, saluant la «grande intelligence» et le «courage» de cette défection, la première parmi les douze promoteurs du projet.
La volte-face des Citizens n’est pas isolée. Les douze clubs se sont rencontrés dans la soirée pour évoquer les deux derniers jours agités, et discuter du futur – désormais très incertain – de la Super Ligue. A l’issue de la réunion, Liverpool, Manchester United, Arsenal et Tottenham, indiquent également avoir fait défection. Chelsea, propriété de l’oligarque russe Roman Abramovitch, a d’abord sous-entendu une telle manœuvre, annonçant plus tôt dans la soirée «préparer la documentation pour demander son retrait de la Super League européenne (ESL)», affirmait alors la chaîne britannique BBC. Avant lui aussi de confirmer plus tard dans la nuit : «Comme révélé plus tôt dans la soirée, Chelsea confirme qu’il a débuté la procédure formelle pour se retirer du groupe qui développe un projet de Super Ligue européenne», a expliqué le club londonien.
Son revirement avait fuité alors qu’un bon millier de fans s’étaient rassemblés devant le terrain de Stamford Bridge avant leur match contre Brighton ce mardi, pour protester contre leur implication. «RIP Football, 1863-2021», «Créé par les pauvres, volé par les riches» ou encore «Roman (Abramovich), prends la bonne décision», les slogans sur les nombreuses pancartes témoignaient de la violence du rejet de cette compétition semi-fermée présentée dimanche. Occasionnant plusieurs moments déroutants : les mêmes supporteurs sont passés de la rage aux sourires en apprenant le possible revirement de leur club… qui n’avait pas encore officialisé. L’ancien gardien de but du club et actuel directeur technique Petr Cech a même dû sortir pour demander aux manifestants de bien vouloir le laisser passer et a essayé de discuter avec eux.
Selon plusieurs confrères outre-manche, les joueurs du club auraient rencontré lundi le président des Blues Bruce Buck. Parmi les préoccupations évoquées, la menace brandie par l’UEFA et la Fifa d’une exclusion des compétitions internationales (Coupe du Monde, Euro, CAN…) pourrait avoir raison de l’avenir de plusieurs joueurs au sein du club.
Pour Manchester United, des doutes avaient commencé à émerger, après que le directeur général des Red Devils, Ed Woodward, a annoncé mardi soir quitter le triple vainqueur de la Ligue des Champions à l’issue de la saison. Le personnage y était peu apprécié depuis son arrivée en 2005, encore moins depuis sa promotion en 2012 au poste de directeur opérationnel. Aucun lien n’a pu pour le moment être fait entre l’annonce de son départ et les remous autour de la Super Ligue.
Outre l’énorme pression mise par les supporteurs et les joueurs, les écuries anglaises sont-elles en train de céder face aux récentes déclarations de Boris Johnson à leur encontre ? Le Premier ministre britannique a assuré mardi qu’«aucune mesure (n’était) écartée» par le gouvernement pour stopper la ligue européenne dissidente, tout en renouvelant «son soutien sans faille aux autorités du football et confirmé qu’ils (avaient) l’appui total du gouvernement pour prendre toute mesure nécessaire pour stopper ce projet» après une rencontre avec les instances du football anglais.
Toujours est-il que le jeu de dominos pourrait ne pas s’arrêter pas là : en Espagne, l’Atlético de Madrid aurait un temps songé à s’extirper du navire, avant de se raviser, selon CBS Sports. Le président du Real Madrid Florentino Perez avait été pourtant clair sur cette association entre puissants : «Le contrat de la Super League est contraignant. Personne ne peut partir, nous travaillerons tous ensemble. Tous les clubs ont signé les contrats samedi dernier, il n’y a pas de problème», assurait-il encore mardi.
Quid désormais des six autres membres fondateurs – le Real Madrid, le FC Barcelone, la Juventus Turin, l’AC Milan, l’Inter Milan – et de l’avenir même de la Super Ligue ? Amputée de la moitié de ses protagonistes, on ne voit plus vraiment comment elle pourrait voir le jour. Les créateurs de la Super Ligue ont d’ores et déjà annoncé dans la nuit de mardi à mercredi qu’ils allaient «reconsidérer les étapes les plus appropriées pour remodeler le projet».
Linfoexpress avec Libération