Le député de la circonscription électorale de Koumassi, Sangaré Yacouba, veut soumettre à ses collègues une proposition de loi sur la légalisation de la polygamie optionnelle dans le code civil. Il a rendu publique cette intention hier jeudi 7 juillet 2022 lors d’une conférence de presse à la Rotonde de l’Assemblée nationale au Plateau.
C’est un texte qui fera certainement couler beaucoup d’encre et de salive. Député de la circonscription électorale de Koumassi, Sangaré Yacouba s’apprête à soumettre aux députés une proposition de loi sur la légalisation de la polygamie. Un sujet presque tabou dans les milieux officiels en Côte d’Ivoire, reconnait. Accompagné de trois de ses collègues notamment Sidibé Daouda (Abobo), Bogro Didi Fidèle (Fresco), Kia Diomandé Roger (Man-commune) et Kangouté Mamadou Moctar (Bouna),il a fait l’annonce hier jeudi 7 juillet 2022 lors d’une conférence de presse à la Rotonde de l’Assemblée nationale au Plateau. «Je suis auteur d’une proposition de loi portant sur cette question que les Ivoiriens évitent si maladroitement», a-t-il annoncé, indiquant que la proposition qu’il entend porter à l’appréciation de ses collègues députés est intitulée comme suit : « proposition de loi modifiant et complétant la loi N°2019-570 du 26 juin 2019 relative au mariage». Même si c’est maintenant qu’il a décidé de rendre publique cette ambition, le député de la circonscription électorale de Koumassi assure que c’est depuis 2014, qu’il a nourri cette idée. «Cette loi a commencé à germer dans la tête en 2014. A l’époque, j’avais ma voisine de droite qui est aujourd’hui Sénatrice. C’est elle qui a eu la première idée. Elle m’a dit qu’on doit faire quelque chose pour l’adoption d’une loi pour instaurer la polygamie puisqu’elle se pratique partout. C’est une femme qui a donné l’idée», a expliqué le parlementaire, ajoutant que depuis 2014, il y a eu tellement de contingences que cette proposition n’a pas pu être soumise aux députés : «aujourd’hui, je me suis dit qu’il fallait donner corps à cette loi pour que nous puissions à notre façon contribuer à la consolidation de la famille au sein de notre société». Aussi, fait-il savoir, cette proposition découle de enquêtes menées dans les différentes couches ivoiriennes et au niveau des sexes. «Et nous connaissons aujourd’hui la proportion des femmes favorables. Même ici à l’Assemblée nationale», a-t-il confié, avant d’annoncer que l’Assemblée nationale a été saisie «de façon officielle». «J’ai une copie de la lettre de saisine pour informer le président de l’Assemblée nationale du dépôt de ma proposition de loi. Il y a la procédure habituelle qui est déclenchée à partir de ma lettre de saisine Il y a tout un parcours avant que la proposition de loi n’arrive sur la table des députés», a-t-il laissé entendre Et d’ajouter : «je pense que ce parcours sera fait, conformément à la loi et qu’un jour, la loi arrivera sur la table des députés pour qu’ils prennent leur responsabilité devant la loi».
Une campagne d’explications annoncée
Mais, le parlementaire sait que ce texte ne rencontrera pas de sitôt l’assentiment d’une frange de la population. C’est pourquoi, il a annoncé une tournée d’explications pour convaincre les leaders d’opinion en général et les organisations de défense des droits des femmes, en particulier sur le bien-fondé de cette proposition. «J’ai préféré commencer par la presse parce que lorsque cela va tomber dans le domaine public, ça ira dans tous les sens. Si les hommes de médias ont l’information à la source, je pense qu’ils seront mieux outillés pour faire vos commentaires », a-t-il expliqué. Ils ne seront pas les seuls. Il annonce une rencontre avec «toutes les personnes désireuses d’en savoir plus pour des échanges afin de ne pas avoir d’autres interprétations tendancieuses de cette proposition de loi». «Je prendrai mon bâton de pèlerin pour faire le tour des personnes dont la parole compte dans notre pays pour ce genre de questions. Dans les jours à venir, il y a des femmes qui vont s’approprier le texte», a-t-il promis.
Selon lui, légaliser la polygamie serait le résultat d’une juste appréciation de la réalité sociale et fera sortir les populations ivoiriennes d’une hypocrisie généralisée. «Vu la multi-culturalité de notre pays, ma proposition de loi institue une polygamie optionnelle, laissée au libre choix de chaque citoyenne et chaque citoyen», fait-il savoir.
Si cette proposition de loi trouve un écho favorable auprès des députés, la Côte d’Ivoire rejoindra entre autres les pays tels que le Gabon, le Cameroun, l’Afrique du Sud, le Sénégal, le Mali, la République centrafricaine, le Congo et le Kenya qui ont consacré dans leur législation, la reconnaissance des mariages polygamiques.
Philippe Nado