18 mois seulement après sa prise de fonction en qualité de secrétaire exécutif du Conseil de l’Entente, une organisation regroupant la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burkina Faso, le Togo et le Niger, l’ivoirien Marcel Amon Tanoh fait face à une fronde.
Le Personnel Statutaire et Fonctionnaires du Secrétariat Exécutif du Conseil de l’Entente, dans une lettre adressée au président du Togo, reproche d’importantes dérives dans la gouvernance de l’Organisation.
Ainsi, les principales dérives constatées concernent la gouvernance administrative et sociale, la gouvernance financière, la gestion du projet de construction de la Tour Entente et les rapports avec les autres organisations sous-régionales.
Dans la gouvernance administrative, le personnel dénonce des réformes non encore approuvées par les Instances sont mises en œuvre telles que : l’abandon des activités opérationnelles (observation des élections, programme frontières, réalisation de projets dans les domaines de l’hydraulique, de l’éducation, de la santé, de l’électrification par énergie solaire et des infrastructures socio-économiques) au profit de dépenses de prestige, notamment des missions du Secrétaire Exécutif dont le montant total se chiffre à plus de 300 millions de francs CFA depuis son arrivée ; l’utilisation d’une nouvelle charte graphique (logo, fanion, etc.).
Le népotisme et le non-respect des textes en matière de recrutement et de gestion des ressources humaines. A ce propos, il note : l’augmentation des effectifs sans tenir compte des capacités financières et de l’organigramme approuvé de l’Institution ; des recrutements sans appel à candidatures et sans respect du principe de la répartition équitable des postes entre Etats membres des rémunérations fixées unilatéralement et au mépris du barème des salaires ; des licenciements abusifs sans respect de la règlementation en vigueur ; le refus de signature des décisions de création du comité du personnel et de la commission consultative paritaire de recours.
La mise en place d’un cabinet pléthorique qui s’est accaparé quasiment des attributions des Départements du Secrétariat Exécutif et subséquemment, la relégation des représentants statutaires des Etats membres au rang de figurants.
Le positionnement du Directeur de Cabinet au-dessus des Directeurs de Départements, représentants des Etats membres ; L’exclusion du Directeur statutaire représentant la République du Bénin de toutes les activités du Secrétariat Exécutif depuis février 2022 jusqu’à son remplacement en mai 2023 pour non port de cravate.
S’agissant de la gouvernance financière, le personnel se plaint de l’augmentation substantielle de la masse salariale causée par les recrutements. ; Le non-respect des procédures de dépenses et de passation des marchés, la révision à la hausse du barème des frais de mission du Secrétariat Exécutif dans un contexte de rareté des ressources financières ; l’instauration à l’avantage du Secrétaire Exécutif de frais journaliers de représentation de 400 000 FCFA en plus des frais journaliers de mission, sans aucune obligation de justification, contrairement à la règle en la matière ; Des missions pléthoriques et onéreuses à travers le monde, manifestement sans résultat/apport concret pour l’Institution au détriment des activités de développement pour le bien-être des populations de l’Espace Entente ; la réalisation d’investissements importants sur le site de relocalisation temporaire qui n’est pas la propriété du Conseil de l’Entente ; le budget 2023, à ce jour, n’a pas été soumis à l’approbation des Instances pour absence de planification et de budgétisation des actions. Par conséquent, l’Organisation fonctionne selon le principe du douzième provisoire pour la première fois depuis la relance de ses activités en 2012 .L’élaboration du nouveau plan stratégique qui a débuté depuis mars 2022, sans associer les Départements, est toujours en cours au niveau du cabinet du Sebrétaire Exécutif.
Concernant la gestion du projet de construction de la Tour Entente, le personnel dénonce la nomination d’un Directeur Général de la Société de Gestion de la Tour Entente (SGTE) sans appel à candidatures. Dès lors, plusieurs actions et dépenses injustifiées continuent de renchérir substantiellement le coût global du projet au détriment de sa rentabilité. On peut citer entre autres : le recrutement gré à gré d’un nouveau prestataire pour une enveloppe de plus d’un milliard de francs CFA pour assurer des missions de Maîtrise d’Ouvrage Déléguée (MOD) alors que le projet dispose déjà d’une mission d’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage (AMO), donc un doublon injustifié ;
la conduite de missions très onéreuses, généralement sans les services techniques, au Maroc (Siège de l’entreprise en charge de la construction), à Paris, à New York sur le budget du projet et parfois concomitamment sur le budget du Secrétariat Exécutif ; Une augmentation du coût de construction du projet de plusieurs milliards de francs CFA est en train d’être envisagée alors que le contrat conclu avec le prestataire est forfaitaire et non révisable.
Sur les rapports avec les autres organisations sous régionales, il est reproché une mission expresse en Chine pour signer un mémorandum d’entente avec une entreprise chinoise pour l’étude de faisabilité du projet « Boucle Ferroviaire de l’Entente » sans aucun mandat des Chefs d’Etats des pays membres du Conseil de l’Entente, créant ainsi une mésentente avec I’UEMOA sur la réalisation dudit projet.
Selon le personnel, cette gouvernance de Marcel AMON-TANOH a occasionné un amenuisement accéléré des ressources financières, un climat social délétère, un personnel démotivé et une situation d’insécurité des emplois.
Eu égard à ce qui précède, il demande le départ du Secrétaire Exécutif.
Fulbert Yao