Une coopérative d’achat de cacao fait face à la justice, pour avoir acheté 9 tonnes de cacao illégal dans la réserve forestière du Cavally. Telle est en substance la principale information qui se dégage du point de presse co-animé, le mardi 9 janvier 2024 à Angré, dans la commune de Cocody, par la Directrice Afrique de l’Ouest de WCF, Emmanuelle Normand et le président de l’ONG Notre forêt, notre avenir (NOFNA), Téré Fidèle.
« Ce procès marque un tournant pour la Côte d’Ivoire », a déclaré Mme Normand, d’autant plus que de mémoire de l’écosystème du cacao, c’est la première fois qu’une coopérative est traduite devant la justice pour achat de cacao illégal. Et de regretter que plusieurs centaines de milliers de tonnes de cacao illégal proviennent des aires protégées et des forêts classées.
Malheureusement, ces espaces protégés ont subi de fortes dégradations depuis plus de cinquante ans et beaucoup de forêts sont désormais des espaces de du cacao non durable. « Les estimations publiques de cacao sortant des forêts classées et des aires protégées sont de 500 000 tonnes par an, soit ¼ de la production nationale. Ainsi ¼ du tonnage du cacao ivoirien est reconnu illégal et non durable », a-t-elle mentionné.
A l’origine de ce procès historique, l’arrestation, le vendredi 30 décembre 2023, d’un camion de cacao qui s’était approvisionné dans la nouvelle réserve forestière du Cavally. Ce coup de filet des éléments de l’Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR) est intervenu suite à une alerte donnée par une observation indépendante menée par l’ONG Notre forêt notre avenir.
« Si les acheteurs sont pour une première fois reconnus coupables, cela permettrait de décourager fortement l’achat du cacao en provenance des aires protégées », a espéré Téré Fidèle. Qui dénonce les grandes pressions dont l’OIPR fait l’objet depuis cette arrestation inédite.
Poursuivant, le président de NOFNA est revenu sur l’important rôle que joue les aires protégées sur les conditions de vie des populations locales, en termes notamment d’agriculture, d’eau potable, de qualité des sols et de l’air, ainsi que d’atténuation des effets des changements climatiques.
Faut-il le noter, l’engagement déclaré par le Gouvernement ivoirien est de reconstituer le couvert forestier pour passer de 11 à 20%, notamment en protégeant mieux les forêts encore intactes et en créant des agro-forêts où le cacao ne pourrait être autorisé que sur 20% de la surface totale sur le long terme.
Sur la base de cette politique forestière, 3 agro-forêts ont été créées par décret, le 13 septembre 2023. Il s’agit de Scio, Rapide Grah et de la Haute Dodo. A la même date, la forêt classée du Cavally a été déclarée aire protégée, devenant ainsi la réserve naturelle du Cavally.
Ce nouveau statut renforce la protection sur la forêt du Cavally en y interdisant la production de bois, la culture de plantation et toute intrusion dans la forêt. Le gestionnaire en charge de cette réserve est désormais l’OIPR au détriment de la SODEFOR.
Traoré Yacouba Diarra