Le Premier ministre Patrick Achi a procédé ce jeudi à Port-Bouet au lancement des travaux préparatoiresde la 6ème édition du Salon International de l’Agriculture et des Ressources Animales d’Abidjan, le SARA, qui se tiendra du 29 septembre au 8 octobre 2023.
Ci dessous son discours
« Aujourd’hui, nous nous retrouvons toutes et tous ensemble, pour une cérémonie particulière, symbolique et à dire vrai, stratégique : celle du lancement des travaux préparatoires de la 6ème édition du Salon International de l’Agriculture et des Ressources Animales d’Abidjan, le SARA, qui se tiendra du 29 septembre au 8 octobre 2023.
Notre cérémonie est en effet stratégique, d’abord par son sujet même. Le SARA, qui ne s’était pas tenu en 2021 du fait des conséquences de la pandémie, est un salon dont l’importance et l’intérêt n’échappent à personne.
Avec plus de 22% du PIB et 60 % des emplois durables en 2020, le secteur agricole occupe en effet une place comme nulle autre, dans notre tissu socio-économique national.
Et ce secteur est au cœur de la vision 2030 du Chef de l’État, SEM. Alassane Ouattara et des transformations structurelles que nous voulons accomplir pour notre production agricole, notre décollage industriel, nos capacités d’export, comme sources de créations d’emplois nouveaux et de revenus supplémentaires.
Cette cérémonie, elle est stratégique également par le thème choisi pour cette 6ème édition du SARA :
« l’Agriculture africaine face aux défis des chocs internes et externes : Quelles innovations structurelles pour améliorer les secteurs agricoles et garantir la souveraineté alimentaire de nos pays ? ».
C’est évidemment un thème d’actualité, au sortir des crises, pandémie, guerre en Ukraine ou terrorisme, auxquelles le monde comme l’Afrique sont confrontés.
C’est un thème, celui de la souveraineté agricole et alimentaire de l’Afrique, qui fut débattu avec force et innovation il y a quelques jours à peine à Dakar lors du Sommet « Nourrir l’Afrique » organisé par la BAD et l’Union Africaine et auquel la Côte d’Ivoire, par la voix du Vice-Président de la République Tiémoko Meyliet Koné, a porté une parole haute et claire. Il a notamment pu partager notre « Pacte de livraison des produits alimentaires et agricoles » basé sur le Plan National de Développement, le Programme National d’Investissement Agricole et la Politique Nationale de Développement de l’Élevage, la Pêche et de l’Aquaculture 2022-2026.
Mesdames et Messieurs,
Après le Royaume du Maroc en 2015, l’Afrique du Sud en 2017 et la France en 2019, c’est le Royaume des PaysBas qui est le pays à l’honneur de la 6ème édition du SARA.
Aussi, voudrais-je au nom du Président de la
République, SEM. Alassane Ouattara, remercier les Pays-Bas et Son Excellence Madame l’Ambassadeur, qui nous fait l’amitié de sa présence aujourd’hui parmi nous.
Madame l’Ambassadeur Yvette DAOUD, je veux ici vous remercier très sincèrement pour votre engagement constant et votre implication personnelle dans la mobilisation de votre pays, aussi bien au plan institutionnel qu’au niveau des entreprises publiques et privées, afin qu’il participe pleinement aux progrès de la Côte d’Ivoire et à son ambition puissante de développement.
Merci également pour votre patience, car cela fait deux longues années que vous attendez l’organisation de cette 6ème édition du SARA, reportée à cause de la pandémie.
Ce choix de mettre les Pays-Bas à l’honneur, n’est naturellement pas le fruit du hasard. Les Pays-Bas sont comme chacun sait le 1er partenaire commercial de la Côte d’Ivoire en matière d’exportation de cacao et donc un acteur absolument central de notre présent et de notre futur.
Mais plus encore, les Pays-Bas sont une nation agricole d’exception dont le modèle ne peut être qu’une source d’inspiration : ils sont une nation agricole où dominent des exploitations agricoles de type familial, comme en Côte d’Ivoire, mais qui parvient grâce à une productivité et un usage de la technologie, à se classer 2ème exportateur mondial de produits agricoles derrière les Etats-Unis, en jouant aussi de son rôle de plateforme d’import / export de l’Union européenne, grâce à la puissance du port de Rotterdam, qui fait partie des 8 plus grands ports du monde.
Enfin, en sus de ces performances quantitatives, les PaysBas figurent en bonne place parmi les champions de l’agriculture durable.
C’est vous dire à quel point, Madame l’Ambassadeur, nous sommes impatients de recevoir les Pays-Bas lors de cette 6ème édition du SARA et impatients de profiter des expériences, des expertises, des innovations et du soutien primordial de votre pays en matière agricole !
Mesdames et Messieurs,
La 6ème édition du SARA se tiendra dans un contexte social et économique mondial éprouvé par les conséquences de la pandémie et du conflit RussoUkrainien, mais aussi par celles du changement climatique et, pour l’Afrique de l’Ouest, par la présence du terrorisme et des crises dans certains pays de la sous-région.
Tous ces facteurs ont perturbé, dans l’Afrique SubSaharienne comme dans l’ensemble du continent, les chaînes et circuits d’approvisionnement et de distribution des produits agricoles, mettant à nu les difficultés et surtout la fragilité de nos systèmes agricoles et la vulnérabilité d’un grand nombre de ménages du continent.
C’est bien là la justification majeure du thème du SARA 2023. Il aura en effet l’ambition de dessiner les innovations structurelles devant nous permettre d’améliorer nos secteurs agricoles et de garantir la souveraineté alimentaire de nos pays.
Car aujourd’hui, en Afrique, près de 285 millions de personnes souffrent quotidiennement de la faim selon les derniers chiffres de la FAO. C’est plus de 20% de la population du continent qui est sous-alimentée en raison des déficits de souveraineté et de sécurité alimentaires. Une prévalence deux fois et demie supérieure à la moyenne mondiale, qui entraîne des impacts majeurs sur le développement des enfants de nos pays, en termes de croissance tant physique que psychologique et de réussite scolaire.
Et notre continent, terriblement dépendant de l’extérieur pour son alimentation, voit en retour l’inflation alimentaire croître. Celle-ci a atteint près de 14% en Afrique en 2022 après 13% en 2021, selon la BAD, au plus haut depuis plus d’une décennie.
Ces chiffres illustrent l’ampleur de nos enjeux et des progrès que nous devons accomplir collectivement, dans des délais de surcroît très court, puisque la démographie africaine augmente aujourd’hui plus rapidement que la production agricole et alimentaire africaine.
Comme l’a dit mon ami et frère Akinwumi Adesina, le Président de la BAD, à Dakar il y a quelques jours : « Le temps de l’action est venu. L’heure est venue pour la souveraineté et la résilience pour l’Afrique ».
Nous en avons toutes les armes.
Avec 25% des terres arables mondiales et surtout 65% des terres arables restantes, l’Afrique a le plein potentiel pour se nourrir et nourrir 9 milliards de personnes dans le monde d’ici 2050.
Nos vastes superficies de savane sont à elles seules estimées à 400 millions d’hectares, dont seulement 10 % sont cultivés. L’agriculture, qui occupe déjà une place centrale dans nos nations, avec 23% du PIB en moyenne et 55% de la population active, doit devenir demain le nouveau pétrole, le pétrole vert du continent, à même de subvenir aux besoins d’une population anticipée à près de 2,5 milliards d’ici 2050. Oui, notre potentiel est immense si nous savons l’exploiter et si nous savons relever le défi de la productivité à l’hectare, souvent inférieur de moitié voire davantage, par rapport aux normes internationales.
Mesdames et Messieurs,
En Côte d’Ivoire, depuis 2011, la modernisation de notre agriculture est au cœur de la vision du Président de la République, SEM. Alassane Ouattara et de l’action de ses gouvernements.
Bien sûr, la Côte d’Ivoire est déjà une grande puissance agricole avec un leadership africain croissant sur certaines productions comme la banane, l’hévéa ou le coton ; et un leadership mondial sur d’autres, tels le cacao, la cajou ou la cola. Il s’agit de faire grandir ces atouts, en produisant plus, mieux, plus vite, en transformant localement une part bien plus grande de nos productions pour les vendre plus cher, mieux les exporter et in fine créer plus d’emplois et plus de revenus pour nos paysans et pour tous les Ivoiriens.
Mais, dans le même temps, des efforts restent à faire dans notre agriculture vivrière afin qu’elle soit plus performante?
C’est face à ce constat que le Chef de l’État, SEM. Alassane Ouattara a souhaité mettre en place la 2ème génération du Programme national d’investissement agricole, pour corriger les facteurs de vulnérabilité de notre agriculture et créer, dans tout le pays, 9 pôles de développement agricole intégrés. Les pôles des régions du Bélier et du Poro ont déjà été lancés ; et deux autres le seront en 2023.
Ces agropôles sont véritablement un changement de paradigme, un « game-changer » comme le disent les anglo-saxons. Ils intègrent en effet aux enjeux de production agricole, l’irrigation, les sujets de la mécanisation, de la commercialisation et de la valorisation des produits agricoles sur place ; tout en prenant en compte la réalisation des services sociaux de base – eau, électricité, santé et éducation -, les services TIC mais aussi la finance de proximité.
La Côte d’Ivoire a également élaboré un Programme d’urgence de soutien aux filières agricoles d’exportation et au secteur des productions alimentaires, le PURGA qui en est à son 2ème volet.
Il nous a permis de faire progresser notre production de riz ou de maïs, tout en mettant en culture actuellement près de 6.000 hectares dédiés aux productions maraichères.
Concernant les ressources animales et halieutiques, nous avons élaboré une Politique nationale de développement de l’élevage, de la pêche et de l’aquaculture, la PONADEPA. Et nous avons lancé l’année dernière le Programme Stratégique de Transformation de l’Aquaculture en Côte d’Ivoire, le PSTACI. Il permettra de structurer une industrie aquacole nationale performante et compétitive pour produire 500.000 tonnes de poissons à l’horizon 2030 et permettre l’auto-suffisance du pays en protéines halieutiques.
Au final, il s’agit pour nous de développer un écosystème global, puissant, cohérent et durable.
Qui améliore le volume et la valeur-ajoutée des productions agricoles. Qui améliore le nombre et la productivité des filières agro-industrielles. Qui améliore la sécurité nutritionnelle du pays. Qui améliore notre souveraineté alimentaire, réduise nos importations et diminue d’autant les prix sur nos marchés. Qui améliore très directement les conditions de vie des populations, leurs revenus. Qui améliore enfin, en les multipliant, les emplois nouveaux pour nos jeunes et nos femmes, elles qui produisent de 75 à 80 % de l’alimentation du pays comme du continent. Et je veux citer ici les Programmes nationaux d’investissements agricoles qui sont en cours, la Stratégie nationale intégrée de promotion des emplois verts ou le Projet « Enable Youth Côte d’Ivoire » qui, en cumulé, ont pour objectif la création de plus de 100.000 nouveaux emplois.
Je veux prendre le temps ici de féliciter Monsieur le Ministre d’État, Ministre de l’Agriculture et du Développement Rural, Monsieur le Ministre des Ressources Animales et Halieutiques, Monsieur le Ministre des Eaux et Forêts, Monsieur le Ministre de l’Environnement et du Développement Durable pour leur action engagée et concertée, dans cette mission stratégique confiée par SEM le Président de la République. Ils en connaissent l’importance absolue pour nos concitoyens, pour notre dynamique de croissance, pour la stabilité du pays comme pour l’enracinement de notre avenir.
Je sais qu’ils ne comptent ni leurs efforts ni leurs sacrifices. Et je sais que nous pouvons compter sur eux pour qu’il en soit toujours ainsi.
Et je sais aussi qu’ils mettront la même énergie dans la préparation de la 6ème édition du SARA que nous lançons aujourd’hui.
Ce salon, par son thème consacré à la sécurité alimentaire, sera un temps de débats approfondis sur les défis qui structurent le présent et l’avenir des agricultures africaines. Mais il sera aussi un temps d’action pour inventer ensemble, grâce à la richesse des expertises du monde entier qui se confronteront, les solutions pour faire progresser la sécurité et la souveraineté alimentaire en Afrique, avec l’appui du secteur privé, d’investisseurs et de partenaires au développement plus engagés que jamais.
Mesdames, Messieurs,
Nous connaissons aujourd’hui clairement les leviers pour faire progresser nos agricultures.
Nous avons en effet d’abord des enjeux structurels – la faible taille de la majorité des exploitations, la marge de progression dans les infrastructures agricoles en particulier d’irrigation mais aussi le défi de la mécanisation et l’usage du digital ; la sécurisation foncière et enfin l’insuffisance de financements, de l’ordre de 50 milliards par an sur le continent au bas mot, puisqu’on estime que seulement 10 % des producteurs agricoles africains, en général ceux qui sont insérés dans des chaînes de valeur de produits de rente, ont accès au crédit.
Et nous avons ensuite des enjeux conjoncturels – la volatilité des prix, la perturbation des chaînes d’approvisionnement, et bien entendu l’intensité des chocs climatiques.
Face à ces enjeux, les instruments d’action collective ne manquent pas : l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, la Stratégie de Malabo, la Zlecaf… Tous les experts le soulignent : si nous sommes capables de mettre en place les bonnes politiques, avec les bons niveaux de financement et de pilotage, la production agricole de l’Afrique pourrait passer de 280 milliards de dollars par an à 1.000 milliards de dollars d’ici 2030 !
A nous donc, au travers du SARA, de répondre présents et de parler en septembre prochain, innovations, actions et solutions.
Et notamment, parmi ces 4 champs qui me semblent particulièrement stratégiques :
1. La responsabilisation des producteurs, via les groupements, la contractualisation et la sécurisation foncière.
2. Le combat de l’intensification productive et climatointelligente, notamment par la maîtrise de l’eau, le capital semencier et l’agroécologie.
3. La montée en puissance des chaînes de valeurs, des filières intégrées et des aires agroalimentaires territorialisées.
4. La mise en place des bons systèmes d’information et des instruments financiers adaptés, où la technologie doit permettre demain d’inventer et de réaliser la fourniture des solutions financières du « dernier kilomètre ».
C’est donc le moment.
Le moment de mener le combat de la productivité agricole.
Le moment d’édifier et d’édifier encore les bonnes infrastructures agricoles.
Le moment de développer des systèmes agricoles adaptés aux évolutions du climat.
Le moment d’amplifier les investissements du secteur privé, tout au long de la chaîne de valeur alimentaire.
Le moment de faire de l’Afrique un grenier alimentaire, pour elle-même d’abord, pour le monde ensuite.
C’est cette ambition qui doit habiter les travaux préparatoires de la 6ème édition du SARA.
Ils permettront de hisser le Salon International de l’Agriculture et des Ressources Animales d’Abidjan au niveau des plus grands salons agricoles mondiaux et surtout, d’en faire une agora formidablement utile et positive pour l’agriculture ivoirienne et africaine et plus encore, pour la souveraineté alimentaire et la vie quotidienne de nos populations.
C’est sur ces mots clairs d’ambition et d’exigence que je déclare lancées, au nom du Président de la République, SEM. Alassane Ouattara, les activités préparatoires pour l’organisation de la 6ème édition du Salon International de l’Agriculture et des Ressources Animales d’Abidjan, « SARA 2023 ».
Vive le SARA 2023 !
Vive la coopération entre la Côte d’Ivoire et le Royaume des Pays-Bas !
Et que vive une agriculture ivoirienne et africaine toujours plus productive et souveraine ! Je vous remercie.