Le 4 octobre 2025, depuis le confort de son domicile lors d’une interview accordée à NCI, Ahoua Don Mello s’est posé en oracle du renouveau, maniant la grammaire politique d’un homme neuf prétendant vouloir délivrer la Côte d’Ivoire de ses chaînes coloniales.
Pourtant, l’ironie est mordante : celui qui pourfend aujourd’hui le franc CFA et le nom même de la Côte d’Ivoire fut hier aux commandes, sans jamais actionner les leviers du pouvoir qu’il tenait pour affranchir le pays des maux qu’il dénonce désormais.
Pire encore, il avoue aujourd’hui son impuissance en reconnaissant ne pouvoir être présent sur tout le territoire durant la campagne, comme si le pays qu’il prétend libérer lui échappait déjà.
Ainsi, le révolutionnaire de canapé d’hier renaît dans son salon d’aujourd’hui, oubliant que la mémoire des peuples, elle, n’a pas la politesse de l’oubli.
Don Mello veut transformer l’avenir les yeux rivés sur le rétroviseur
Ahoua Don Mello parle comme s’il découvrait la colonisation au XXIᵉ siècle. Il s’indigne que la Côte d’Ivoire porte un nom hérité, comme si lui et ses camarades refondateurs n’avaient pas eu dix ans pour le renommer.
Il fustige le franc CFA, oubliant que sous Laurent Gbagbo, les discours souverainistes s’arrêtaient aux portes de la BCEAO.
Le verbe flamboyant servait alors d’écran de fumée à une inaction politique chronique.
Il s’insurge contre l’expropriation des paysans, mais fait semblant d’ignorer que, sous leur gouvernance, ces mêmes paysans, accablés par des politiques incohérentes, en vinrent à brûler leur propre production de cacao, symbole d’un échec économique grimé en héroïsme patriotique.
La refondation : une illusion au goût amer
Le programme de la « Refondation » dont il fut l’un des architectes avait promis la renaissance nationale.
En réalité, il a surtout refondé la pauvreté, institutionnalisé la précarité et exécuté ses opposants .
La décennie 2000-2010 fut moins un laboratoire d’indépendance qu’un atelier de déconstruction nationale, où la rhétorique anti-impérialiste servait de paravent à une gestion approximative et clientéliste.
La refondation, censée libérer, a enfermé. Et Ahoua Don Mello, aujourd’hui converti au catéchisme du panafricanisme de circonstance, en fut le grand prêtre silencieux.
Le patriote reconditionné
A force de se réinventer, Ahoua Don Mello ressemble à ces anciens marxistes devenus consultants libéraux.
Il s’adapte, se repeint, mais ne change jamais de nature. Son discours d’aujourd’hui n’est qu’un recyclage idéologique de ce qu’il n’a jamais osé accomplir hier.
Il évoque la souveraineté comme une idée neuve, mais ce n’est qu’un vieux refrain qu’il remet en scène au rythme des caméras. Ce n’est pas un visage neuf qui s’exprime, mais l’ancien directeur du bureau national d’études techniques et de développement (BNETD) en quête de résurrection médiatique, s’efforçant de repeindre sa carrière fanée aux couleurs d’une virginité politique retrouvée.
La nostalgie comme programme
Ahoua Don Mello n’est pas un novice de la politique ivoirienne. Il en est un vétéran revenu d’un long voyage d’illusions.
Ses prêches sur la liberté, la dignité et l’identité sentent moins la conviction que la nostalgie.
Derrière les grands mots et les accents souverainistes se cache une vérité plus triviale. On ne devient pas neuf en changeant de discours, mais en changeant d’action. Et lui, depuis vingt ans, n’a changé que de chaise.
Kalilou Coulibaly, Doctorant EDBA, Ingénieur