La Fondation internationale pour l’observation et la surveillance des droits de l’homme et la vie pacifique (Fidhop) a investi le terrain depuis le lancement de la campagne électorale jusqu’à la proclamation des résultats.
Au terme de ce périple, elle était face à la presse le Mardi 5 septembre 2023, dans un espace hôtelier de la commune de Cocody.
Dans son rapport , elle a formulé plusieurs recommandations dont un audit et la mise à jour de la liste électorale. Cela, avant la présidentielle de 2025.
Ci dessous lesdites recommandations
A – CONCERNANT LE DÉROULEMENT PRATIQUE DU SCRUTIN :
La question du retard à l’ouverture du vote et du matériel électoral défaillant :
Ceci est de l’entière responsabilité de la CEI, parce que le retard est récurrent élection après élection. Il revient à l’institution de tout mettre en œuvre pour résoudre ces problèmes. La CEI doit gagner en professionnalisme !
B – CONCERNANT DES ACTES DE FRAUDE OU DE VIOLENCE :
1/ A propos de la fraude :
– Les Bénévoles de l’OIDE ont certes reçu des alertes de tentatives de fraude ; mais aucune fraude n’a été formellement détectée. Est-ce à dire que ces élections du 2 septembre ont été sans aucune fraude ? Pour la FIDHOP, la possibilité de fraude n’est jamais à exclure de façon absolue au cours d’un scrutin, notamment en Afrique.
– En effet, la fraude étant très complexe, elle peut se préparer et se réaliser à plusieurs niveaux du processus électorale. Ainsi, deux étapes devraient être surveillées et maitrisées par toutes les parties prenantes dans le processus, pour plus de transparence : il s’agit d’une part de la liste électorale, avec des noms d’inscrits disparaissant ou se déportant parfois d’un bureau de vote A, à un autre bureau de vote B, souvent dans une autre ville ; et d’autre part, le système des tablettes, qui pourrait être une piste de fraude, puisque la CEI reste seule à contrôler l’accès au serveur.
Il s’impose de rendre ce système plus transparent.
2/ La fraude ne saurait être brandie pour justifier des échecs pourtant prévisibles !
Dans bien des cas, des candidats de l’opposition se sentant en difficulté, ont tenté de se réfugier derrière une fraude imaginaire. Pire, il y en a qui ont tenté de manipuler l’opinion : les Observateurs de l’OIDE l’ont constaté à Gagnoa et à Yopougon. Ceci est à éviter, pour ne pas allumer de feu de violences inutiles.
La CEI, mais également les autorités en charge de l’ordre public, devraient y veiller scrupuleusement.
C – APPEL AUX PARTIS POLITIQUES ET AUX INDEPENDANTS, POUR PLUS DE VITALITE DANS LA VIE DEMOCRATIQUE EN CÔTE D’IVOIRE :
1/ La suprématie du parti au pouvoir est-elle avantageuse pour la Démocratie ?
LA FIDHOP dit non !
En effet, même si le RHDP a remporté ces élections de façon écrasante, le parti au pouvoir devrait tout de même œuvrer pour que le jeu électoral soit plus ouvert, qu’il soit juste, transparent et à chance égale pour tous candidats. En cela, la transparence s’impose sur la liste électorale ; ainsi que dans l’occupation de l’espace médiatique, à travers les médias publics. Car, « à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. » (Corneille, dans le Cid).
Ce qui ferait noyer le sentiment d’un retour au parti unique ou d’une « dictature rampante ou sournoise ».
2/ L’opposition ivoirienne devrait de remettre en cause et se réinventer, pour donner un sens à la Démocratie :
– L’opposition ivoirienne devrait tirer toutes les leçons de sa débâcle à ces élections du 2 Septembre 2023.
– L’opposition devrait penser à mieux se préparer pour toutes élections à venir :
Elle devrait penser à son unité, au lieu de se disperser et de s’affronter elle-même, ce qui paraitrait irresponsable ;
Elle devrait plutôt mettre en avant l’intérêt général, en faisant le choix des meilleurs candidats lorsque cela est nécessaire.
3/ Les Indépendants élus devraient éviter de troubler le jeu démocratique :
Être Indépendant est un risque, pour celles et ceux qui appartiennent à des formations politiques et qui se sont rebellés pour candidater ; mais c’est surtout un gage vis-à-vis du peuple, pour celles et ceux n’ayant aucun parti politique. Alors, il s’impose aux indépendants d’assumer leur indépendance jusqu’au bout.
Retourner vers son parti d’origine pour lui verser sa victoire à l’issue du scrutin, ou rejoindre un quelconque parti avec sa victoire dans le but de grossir le nombre d’élus de celui-ci, moyennant généralement forte rémunération, est une haute trahison à l’égard du peuple, qui ne devrait plus jamais accorder sa confiance à de telles individus !
D – CONCERNANT LES MANQUEMENTS A LA LOI ET AUX PRINCIPES DEMOCRATIQUES :
1/ La loi relative aux collectivités, la Loi n°2012-1128 du 13 décembre 2012 portant organisation des collectivités territoriales :
Devra désormais être appliquée dans toute sa rigueur, notamment en ses Articles 38 et 39, qui rend inéligible tout Conseiller municipal ou régional n’ayant pas participé, sur un certain temps, aux réunions du Conseil.
2/ Pour une égalité et une justice entre tous les candidats :
La FIDHOP propose que certaines dispositions soient prises, pour un plafonnement des dépenses de campagne électorale aux élections, municipales, régionales, sénatoriales, législatives et surtout présidentielles ; parce que sur le terrain, certains en écrasent des adversaires par leurs fortunes.
3/ S’agissant de la participation des membres du gouvernement, des présidents d’institutions ou des directeurs généraux de l’État à toutes élections :
La FIDHOP estime que la participation de ces personnalités à des élections devrait être encadrée et contrôlée ; puisque leur statut influence parfois certains électeurs.
4/ Quel sort devrait être réservé à des membres du gouvernement, à des présidents d’institutions ou à des directeurs généraux ayant échoué à des élections municipales et régionales ?
Pour la FIDHOP, le fait que le Peuple, notamment dans leur propre région, leur a refusé sa confiance, ces personnalités auront perdu de leur légitimité et donc de leur autorité !
Le Président de la République devrait en tirer les conséquences ; et le cumul des postes devrait être remis en question.
5/ La question épineuse de la CEI est à régler, pour une présidentielle de 2025 plus démocratique :
S’il est vraiment vrai que le RHDP a remporté haut les mains les élections municipales et régionales du 2 Septembre 2023, alors une réforme profonde de la Commission Électorale Indépendante ne devrait donc aucunement déranger le pouvoir.
Ainsi, pour briser toutes suspicion sur la CEI, dont des agents ont souvent des familiarités avec le parti au pouvoir, la FIDHOP recommande ce qui suit, qui devrait être pris en compte bien avant l’élection présidentielle de 2025 :
– Que la CEI centrale et les CEI locales soient totalement reformées, pour être dirigées par des acteurs de la société civile (comme en 2000) ; avec certes des représentants d’institutions de l’État, mais n’ayant que le statut d’observateurs, sans droit de votes ;
– Que le président de la CEI centrale, pour faire consensus, pour qu’il soit au-dessus de tout soupçon et indépendant dans sa mission, puisse être désigné soit par appel à candidature, soit à l’issue d’un vote par des institutions de la société civile ; soit même au suffrage direct ou indirect ;
– Que la liste électorale soit auditée, toilettée et mise à jour, en 2024, puis en 2025, avant la présidentielle ; et
– Que le système des tablettes soit mieux expliqué aux Ivoiriens pour plus de transparence dans le jeu électoral.
Telles sont les Recommandations finales de la FIDHOP, tirées des enseignements du scrutin du 2 Septembre 2023 en Côte d’Ivoire.
Fulbert Yao