À Bonoua, il ne fait pas bon vivre pour certains agents de santé. Plusieurs d’entre eux subissent des violences de la part de la population, au point que l’envie de travailler s’en trouve altérée.
Le cas le plus récent s’est déroulé le mardi 10 juin 2025, aux alentours de 18h30. L’infirmière T.K.F et son équipe de garde ont reçu une personne âgée, accompagnée de quelques-uns de ses enfants. Pendant qu’un collègue examinait la patiente âgée, un jeune homme est arrivé avec près de dix accompagnateurs. Il présentait une profonde lésion contuse au bras gauche, apparemment unique, car il était torse nu.
L’infirmière T.K.F a demandé à un stagiaire de placer des compresses sur la plaie, qui saignait. Son collègue, après avoir terminé avec la première patiente, est allé vérifier s’il n’y avait pas d’autres lésions.
L’infirmière T.K.F a ensuite demandé le nom du jeune homme pour l’inscrire dans le registre de consultation. Comme personne ne répondait, elle a commencé à rédiger l’ordonnance. Au cours de la prescription, le blessé s’est plaint qu’elle aurait dû poser un bandage sur sa plaie plutôt que de lui demander son nom. Dans un accès de colère, il a alors lancé le registre au visage de l’infirmière, avant de lui jeter une chaise.
Face à cette situation, une délégation de la Plateforme Santé, conduite par Kpan Mouty, accompagnée de membres du Synadsio-CI, a été reçue ce mardi 8 juillet par Sa Majesté Miessan Kacou Venance, à la cour royale.
Au cours des échanges, Kpan Mouty a sollicité l’appui du Roi pour sensibiliser la population, rappelant que les agents de santé sont présents avant tout pour la santé des habitants :
« Nous ne sommes pas des ennemis. Mais nous ne pouvons donner que ce que nous avons à l’hôpital. Ce que nous n’avons pas, nous devons parfois demander aux patients de nous aider à l’obtenir. Il ne faudrait pas que les gens y voient une forme de corruption ou qu’ils pensent que nous gardons les produits qui nous sont destinés pour soigner. Il y a ce que nous avons, et il y a ce que nous n’avons pas. La population doit comprendre cela. »
Le syndicaliste a également plaidé pour la mise à disposition d’une équipe de veille afin de soutenir les vigiles de garde « Il faut sensibiliser la population sur le fonctionnement de l’hôpital, diffuser régulièrement des messages dans les quartiers, et aider à retrouver l’usager qui a agressé notre collègue. »
Concernant les visites et les horaires à l’hôpital, il a souligné la nécessité d’une éducation au sein de la population et a proposé la présence d’un représentant communautaire à l’accueil, qui ne soit pas un agent de santé, afin d’expliquer le circuit hospitalier. Il a également insisté sur la limitation du nombre d’accompagnateurs et rappelé que les agents de santé, à l’instar des membres de la Croix-Rouge, sont appelés à intervenir dans toutes les situations. Enfin, il a suggéré le recrutement éventuel de vigiles au sein même de la population.
En réponse, Sa Majesté Miessan Kacou Venance a pris la parole. Il a exprimé sa colère face à ces actes et déploré que l’auteur de l’agression n’ait pas encore été identifié.
Le Roi a invité les agents de santé à ne pas se laisser décourager par des cas isolés. Il a promis que des enquêtes seraient menées pour retrouver les fauteurs de troubles.
Sa Majesté Miessan Kacou a également annoncé la tenue prochaine d’une réunion avec le préfet afin de lui exposer la situation :
« Nous allons activer notre plan Vigipirate. Je vous témoigne toute ma solidarité. Pour ceux qui envisagent de quitter Bonoua, je vous demande de revoir votre position. Laissez-nous le temps de gérer cette affaire à notre façon. Percevez notre volonté de changer les choses », a déclaré le Roi devant la délégation.
Au terme de la rencontre, Kpan Mouty s’est dit globalement satisfait « Le Roi nous a promis de sensibiliser sa population et de transmettre fidèlement notre message, afin d’éviter des affrontements et d’empêcher le départ massif des fonctionnaires de Bonoua. Nous devons rester unis pour protéger la population et garantir la santé des habitants de Bonoua. Je compte énormément sur le Roi pour assurer la quiétude et la sécurité des agents de santé. »
Pour sa part, Elo A. Alexandre, chef de la génération au pouvoir, a réitéré ses excuses pour ce désagrément. Il a promis qu’une vaste campagne de sensibilisation serait menée auprès des populations et a assuré que le Roi convoquera une grande réunion communautaire.
« Je crois que nous devons travailler ensemble pour que l’État sache que le corps médical est là pour servir la population. », a t il dit.
À noter que Bonoua, grande ville située au sud d’Abidjan, compte près de 117 000 habitants.
Fulbert Yao depuis Bonoua