Dans ce monde où le carburant vaut de l’or, les pompistes et graisseurs des stations en Côte d’Ivoire vivent le cauchemar. En plus de la précarité, les décès deviennent récurrents dans leur corporation.
Face à cette situation, le Syndicat national des pompistes et graisseurs (SPGCI) a choisi de rompre le silence.
Vêtu de blanc, avec un bandeau noir attaché à sa tête, à l’instar de ses camarades, le secrétaire général Richard Christian M’bassidjé a animé une conférence de presse, ce lundi 29 septembre 2025, au siège de la Plateforme nationale à Abidjan-Cocody.
Dans sa déclaration, il a rappelé que depuis juillet, quatre pompistes ont perdu la vie en plein service ou à l’issue de journées harassantes. Il s’agit d’Abdoulaye Assongo, effondré à l’aube sur une station Total de Cocody ; d’un pompiste de Shell, parti faire une pause nocturne dont il ne s’est jamais relevé ; de Mian Pascal, terrassé après une nuit de travail et qui n’est pas revenu de l’hôpital ; et plus récemment de Koffi Kouadio Marius, 35 ans, pompiste sur une station Oryx de Foungbesso, emporté par un AVC.
« Trois années de service, sans un seul bilan de santé. C’est inacceptable », a dénoncé M’bassidjé.
Selon le SPGCI, ces morts sont la conséquence directe du non-respect du Code du travail. La quasi-totalité des pompistes travaillent sans immatriculation à la CNPS, sans assurance maladie, avec des salaires parfois inférieurs à 75 000 F CFA. Des conditions indignes, martèle le syndicat.
Il y a aussi des fausses couches à répétition chez les femmes, des maladies ignorées, des humiliations quotidiennes. « Certains gérants obligent même leurs employés à acheter leurs chaussures de sécurité », a déploré M’bassidjé.
Le syndicaliste a dénoncé le fait que les grandes compagnies pétrolières – Total, Vivo, Oryx, Ola, Petro-Ivoire… – se déchargent sur les gérants, niant toute responsabilité. Pourtant, ce sont leurs uniformes que portent les travailleurs, leurs logos qui brillent sur les stations, leurs normes de service qu’ils imposent. Mais lorsqu’un pompiste meurt, silence. Lorsqu’un pompiste est licencié pour une pause de dix minutes, indifférence.
Face à ce triste tableau, le secrétaire du SPGCI ne demande pas la lune. Il plaide pour « un bilan de santé annuel, une assurance maladie adaptée, la sécurisation des emplois malgré les changements de gérance, et surtout le respect du Code du travail ». Des droits élémentaires, déjà inscrits dans la loi, mais jamais appliqués.
Il appelle aussi le président Alassane Ouattara à protéger les travailleurs.
« Nos vies ne doivent plus être des sacrifices silencieux », a lancé M’bassidjé.
Au Premier ministre Robert Beugré Mambé, il demande « d’agir immédiatement », avant d’autres drames.
À noter : ce sont plus de 15 000 pompistes et graisseurs qui travaillent dans les stations-service du pays.
Fulbert Yao