C’est avec « une armée » d’hommes d’affaires que le président français, Emmanuel Macron entame à partir de ce mercredi 5 avril 2023 une visite de trois jours en Chine. Pas moins d’une soixantaine de patrons de sociétés françaises, dont ceux d’Airbus, EDF, Alstom ou Véolia, sont du voyage.
Ce séjour du locataire de l’Elysée au pays de l’Empire du milieu vise à réduire le déficit commercial de la France à l’égard de la Chine dont les produits ont envahi le marché hexagonal. La part de marché de la France en Chine qui est en baisse constante, est aujourd’hui de 1,3%. Soit trois fois moins que celle de l’Allemagne. « Le déficit commercial n’a jamais été aussi important entre les deux pays, les investissements chinois en France sont réduits à la portion congrue et la France peine toujours à diversifier ses partenaires », commente Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et enseignant à Sciences Po. Emmanuel Macron espère donc encourager un « meilleur accès au marché chinois » et « des conditions équitables de concurrence », a expliqué son entourage.
Le ralentissement de l’activité du au COVID 19 a fini par décourager quelques grandes entreprises françaises parties très tôt à l’assaut du plus grand marché du monde. Confrontées à des rivaux locaux, elles ont préféré jeter l’éponge comme l’ont fait Carrefour et Auchan, des piliers de la grande distribution. Le vide a été vite comblé par des fleurons chinois qui ont émergé dans plusieurs secteurs, où les sociétés françaises avaient plutôt du succès à l’international. Dans le secteur de l’automobile, ni Renault ni Stellantis ne sont parvenus à séduire les fabricants chinois déjà des champions de la voiture électrique. C’est encore plus vrai pour l’industrie ferroviaire ou le nucléaire où les Chinois n’ont plus besoin du savoir-faire français jouissant pourtant d’une bonne réputation mondiale.
L’autre enjeu du déplacement de Macron aura forcément un caractère politique avec la guerre entre la Russie et l’Ukraine qui place la Chine dans le rôle d’arbitre. C’est la raison pour laquelle le président français fait aussi route aux côtés de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Il est avant tout venu chercher à Pékin un « espace » de dialogue avec son homologue chinois Xi Jinping sur la guerre en Ukraine. « La Chine est le seul pays au monde en mesure d’avoir un impact immédiat et radical sur le conflit, dans un sens ou dans l’autre », a estimé l’Élysée.
Emmanuel Macron garde l’objectif de convaincre son homologue chinois de ne pas franchir la ligne rouge en fournissant des armes à la Russie. Il dispose, pour ce faire, de quelques cartes à jouer. Outre sa persévérance – l’Élysée assure qu’il est l’un des rares chefs d’État qui « peuvent discuter six, sept heures » avec le président chinois Xi Jinping pour plaider la cause de la paix –, le président français compte capitaliser sur le bloc européen. Avec l’appui d’Ursula von der Leyen, Emmanuel Macron entend « faire peser l’Union européenne de tout son poids », assure Elvire Fabry, chercheuse à l’Institut Jacques Delors chargée de la géopolitique du commerce.
Il n’est pas évident que Xi Jinping prête une attention particulière à la démarche du Français en raison de ses relations particulières avec Vladimir Poutine. La visite de Xi Jinping à Moscou le 20 mars 2023a douché les espoirs des occidentaux, tant les deux dirigeants ont affiché leur volonté farouche de développer leurs relations. Mais il n’est pas exclu que Xi Jinping donne des signaux favorables aux occidentaux en raison de sa volonté de ne pas fermer la porte aux Européens.
Nomel Essis