La découverte, en septembre dernier, d’importants gisements de gaz et de pétrole découverts au large de la Côte d’Ivoire devrait booster l’économie du pays lors de la phase de production. Cette assurance émane du ministre des Mines, du Pétrole et de l’Energie, Thomas Camara, qui accordait un entretien en ligne à France 24.
Journaliste :Monsieur le ministre, cette découverte est une aubaine pour la Côte d’Ivoire, on l’imagine pour son développement…
Ministre : Oui, tout à fait ! C’est une aubaine pour le développement de la Côte d’Ivoire. Effectivement, c’est une découverte qui a été faite par la société Eni, aux larges des côtes ivoiriennes en août 2021, et cette découverte traduit le retour de la Côte d’Ivoire au niveau des producteurs, des grands producteurs de pétrole brut et il faut reconnaitre et saluer respectivement les efforts entrepris par le président de la République de Côte d’Ivoire, SEM Alassane Ouattara, qui, depuis son avènement en 2011, à la tête du pays, a engagé beaucoup d’efforts, d’abord pour repositionner la Côte d’Ivoire au plan international. Ce qui a permis aux sociétés étrangères, aux sociétés internationales de regagner confiance, de retrouver la confiance et de revenir en Côte d’Ivoire. Il a redynamisé tous les secteurs d’activités dont le secteur du pétrole, d’où cette découverte a été faite. C’est donc le couronnement des efforts du président de la République qui se traduit par cette découverte importante parce que c’est de taille mondiale.
Monsieur le ministre, quel est le potentiel de cette trouvaille, est-ce que ça va permettre de répondre à une partie de la demande intérieure, est-ce que cela va permettre d’exporter aussi du gaz et du pétrole ?
Oui, tout à fait, le potentiel est important, vous l’avez dit, ce sont 2 milliards de barils de pétrole brut et 2400 milliards de pieds cubes de gaz naturel. Ce gisement va être exploité en 2 phases : d’abord la première phase en 2023, où on accédera à environ 15% de la production à terme et une deuxième phase en 2026 où on sera à plein régime et on espère maintenir ce régime pendant 20-30 ans de production.
Vous avez choisi l’Italien Eni pour exploiter ce gisement, le PDG d’Eni n’a pas donné de chiffre concernant la part des retombées qui reviendra à la Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens, la population va-t-elle bénéficier de ces retombées, de cette découverte majeure, et si oui comment ?
Alors, à trois niveaux, j’allais dire, ce gisement contient du pétrole brut et du gaz naturel. Le pétrole brut sera commercialisé au plan international et donc les ressources issues de la vente de ce pétrole reviendront en partie à la Côte d’Ivoire, et serviront donc à l’économie nationale, et donc au bonheur des populations.
Dans quelle proportion ?
C’est assez technique, mais on dira qu’après avoir couvert les coûts de production, la Côte d‘Ivoire bénéficiera de 52% du profit d’une part, et de 10% des 48% restants, d’autre part.
« Pourquoi nous avons choisi l’italien ENI »
Donc, ça, c’est dans les caisses de l’Etat…
C’est une part considérable du produit et cela reviendra dans les caisses de l’Etat pour assurer le développement du pays pour le bonheur des populations. Ensuite, il y a le gaz naturel, qui sera utilisé entièrement pour la production d’électricité en Côte d’Ivoire. Et sur ce sujet-là, il faut préciser que le pays est en croissance au-delà de 6% depuis plusieurs années, depuis l’avènement du président de la République. Et cette croissance s’accompagne de demande énergétique forte. D’ailleurs, on va dire que le nombre de localités électrifiées en Côte d’Ivoire a augmenté de 230% depuis 2011, la couverture du pays est passée de 33% en 2011 à 80% en 2020. Et donc c’est une demande importante d’énergie électrique et ce gaz naturel associé qui va sortir de ce gisement permettra de répondre à lademande des populations en énergie électrique. Et le troisième aspect, c’est que le développement de ce champ va être fait par les spécialistes de la société Eni. Mais, compte du contenu local, qui est une instruction du président de la République, compte tenu donc de cette politique de contenu local, il y aura des centaines de techniciens et d’ingénieurs ivoiriens, qui seront formés et qui participeront à l’exploitation de ce gisement pendant plusieurs années. C’est donc de l’emploi qui va être procuré au pays.
Donc des emplois à la clé. Pourquoi avez-vousfait appel à une entreprise extérieure pour exploiter ces gisements ? En l’état, la Côte d’Ivoire ne peut pas exploiter seule ses ressources ?
La découverte a été faite par la société italienne Eni, et donc dans les contrats de partage de production, quand la découverte a été faite par une société, elle est mise en exploitation par cette société parce que nous n’avons pas les moyens d’assurer le financement nécessaire pour développer ce champ ; c’est une activité fortement capitalistique, nous n’avons pas toutes ces ressources pour développer ce champ, donc la société Eni va déployer tout cela et dans le cadre du partage de production, nous bénéficieront de 52% dont je vous parlais au niveau du profit dégagé par cette exploitation sans y investir un sou.
Monsieur le ministre, il se pose aussi la question environnementale, puisque votre pays s’était engagé à ce que d’ici à 2030, 42% de son énergie soit renouvelable contre 34% en 2020, est-ce que cette ambition est encore d’actualité au regard de cette découverte ?
Oui, effectivement, la transition énergétique est une préoccupation au quotidien du président de la République, d’ailleurs il a pris des engagements à l’international sur cette question et la demande en énergie est très forte comme je vous le disais tantôt, mais malgré cette demande en énergie, le président de la République a pris une décision courageuse au lendemain de la Cop 26 de renoncer à la centrale à charbon qui était prévue dans ce pays. C’est une affirmation forte pour la transition énergétique dans notre pays.
Mais là, vous vous redirigez vers des énergies fossiles ?
…Et ce faisant la Côte d’Ivoire se positionne comme leader dans la sous-région au niveau de la transition énergétique. Elle constitue un exemple pour les pays de la sous-région, et toujours dans cette volonté de respecter son engagement au niveau international, le chef de l’Etat a demandé à la société Eni de faire en sorte que l’exploitation de ce gisement soit réalisée avec des projets à la clé qui permettent de diminuer l’impact carbone. A savoir le développement et l’entretien de centaines d’hectares de forêts en Côte d’Ivoire, qui permettraient à la société Eni-on le sait, la forêt est un puits de carbone-par cette activité de réduire au minimum possible, l’impact-carbone lié à l’exploitation de ce champ, qui est nécessaire pour accroître la production d’électricité pour répondre aux besoins en énergie des populations.
Vous parlez-là de compensation, monsieur le ministre si on a bien compris, vous conviendrez quand même que l’extraction du pétrole et du gaz reste de l’énergie fossile, vous n’avez pas le sentiment de faire du greenwashing, d’aller à l’encontre d’un mouvement mondial pour sauver la planète ? A la Cop26, on a bien senti ce mouvement mondial se lever !
Non, puisque je vous le disais, les instructions ont été données pour que l’exploitation de ce gisement soit neutre en termes de carbone, cela veut dire qu’on n’aggrave pas la situation, donc en même temps qu’on se préoccupe d’apporter l’énergie aux populations, qui est une demande importante et qui contribue au bien-être des populations, en même temps, on s’assure que l’exploitation de ce gisement ne va pas aggraver l’impact-carbone en Côte d’Ivoire et mieux, je vous le disais, le président de la République a pris la décision de renoncer à la centrale au charbon. Et avant la Cop 26, la Côte d’Ivoire s’était engagée à avoir un pourcentage d’énergie renouvelable de 42% dans le mixte énergétique à l’horizon 2030 ; mieux, à la Cop 26, la Côte d’Ivoire a décidé de passer ce pourcentage de 42% à 46% d’énergie renouvelable dans le mixte énergétique. Cela veut dire qu’on va dans le sens de la transition énergétique, ce qui est donc une instruction ferme donnée par le président de la République, et que nous attelons à la réaliser.