L’Ambassadeur de la République populaire de Chine en Côte d’Ivoire, WAN Li, salue dans cette interview la bonne santé de la coopération entre les deux pays et annonce des projets développement en faveur des Pays en voie de développement (PVD), dont l’Afrique.
Excellence Monsieur l’Ambassadeur, la Chine célèbre le 1er octobre le 72e anniversaire de la révolution menée par MAO Zedong. Quel regard jetez-vous sur le chemin parcouru ?
Le Président MAO Zedong, en tant que noyau de la direction centrale de la première génération du Parti Communiste Chinois (PCC) est le fondateur principal de la République populaire de Chine. Sous sa direction, la Chine a promu l’édification du socialisme, établi le système fondamental du socialisme, réalisé la révolution sociale la plus vaste et profonde dans l’histoire de la Chine, et posé un préalable politique fondamental et un fondement institutionnel à la réalisation du grand renouveau de la nation chinoise.
À la fin des années 1970, la direction centrale de la deuxième génération du PCC rassemblée autour du camarade Deng Xiaoping a jugé avec précision la tendance générale du monde que le développement et la paix demeuraient les thèmes de l’époque, et a fait la décision majeure de recentrer la mission centrale du parti et de l’Etat sur la construction économique. Depuis lors, nous nous engageons à promouvoir la réforme et l’ouverture, à créer et à développer sans cesse le socialisme aux caractéristiques chinoises, à établir progressivement un système d’économie de marché socialiste, à promouvoir l’ouverture tous azimuts. Les conditions de vie du peuple chinois n’ont cessé de s’améliorer.
Depuis le 18e Congrès du PCC en 2012, le socialisme aux caractéristiques chinoises est entré à une nouvelle ère. Sous la direction du comité central du PCC rassemblé autour du camarade Xi Jinping, nous avons promu dans l’ensemble le développement économique, politique, culturel, sociétal et écologique, fait progresser de manière coordonnée le schéma stratégique de la construction globale d’un pays socialiste moderne, de l’approfondissement intégral de la réforme, de la promotion intégral du gouvernance de l’Etat conformément à la loi et de la gouvernance du Parti d’une manière stricte. Nous avons réussi à relever une série de défis et risques importants, à atteindre le premier objectif centenaire, à savoir l’édification intégrale d’une société de moyenne aisance. Nous sommes prêts à travailler pour la réalisation de notre second objectif centenaire, de faire de la Chine un pays socialiste moderne, prospère, puissant, démocratique, harmonieux et hautement civilisé, d’ici 2049, au moment du centenaire de la fondation de la République Populaire de Chine.
En bref, au cours des 72 années écoulées depuis la réalisation de l’indépendance nationale et la fondation de la République Populaire de la Chine, le PCC a uni le peuple chinois et l’ai conduit à poursuivre sa lutte inlassable pour réaliser le rêve chinois du grand renouveau de la nation chinoise. La nation chinoise est en voie d’accomplir un grand bond, passant d’une nation qui s’est relevée à une nation prospère, puis à une nation puissante.
Depuis l’éclatement de la pandémie de la COVID, la Chine s’est montrée solidaire à l’endroit des pays d’Afrique à travers l’envoi de médecins, l’offre gratuite de vaccins, l’annulation de la dette etc. Certains observateurs affirment que la Chine ne fait pas ces gestes pour rien, mais pour les séduire afin de signer des contrats avec ces pays. Ces critiques sont-elles fondées à vos yeux ?
Comme ce que vous avez mentionné, la Chine soutient fermement l’Afrique dans sa lutte contre la pandémie de la Covid-19 et sa relance économique depuis l’éclatement de cette pandémie. La Chine a non seulement livré une grande quantité de matériels sanitaires à plus de 50 pays africains et à l’Union africaine, envoyé plus de 170 groupes d’experts médicaux dans 15 pays africains, mais également organisé plusieurs vidéoconférences d’experts avec des pays africains pour partager ses expériences dans la lutte contre la pandémie. Par ailleurs, la Chine soutient et participe activement à la facilité COVAX. Au débat général de la 76e session de l’Assemblée générale des Nations Unies, le Président Xi Jinping a promis de fournir au total deux milliards de doses de vaccins au monde au cours de l’année 2021. Et en plus du don de 100 millions de dollars américains fait à la facilité COVAX, la Chine fera don de 100 millions de doses de vaccins supplémentaires à des pays en développement cette année. En même temps, en respectant le consensus atteint par les dirigeants chinois et africains ainsi que l’Initiative du G20 de suspension du service de la dette (ISSD), nous avons signé des accords sur la suspension du service de la dette ou atteint un consensus en la matière avec 16 pays africains. Dans le cadre du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA), la Chine a également annulé les prêts sans intérêt arrivant à échéance fin 2020 de 15 pays africains. En plus, au Sommet mondial sur la Santé tenu en mai 2021, le Président Xi Jinping a promis d’accorder d’ici trois ans une aide supplémentaire de 3 milliards de dollars américains pour soutenir les pays en développement, dont les pays africains, dans la riposte sanitaire et la reprise économique et sociale.
La raison pour laquelle la Chine a fait cela est que la Chine et l’Afrique sont de bons amis, de bons partenaires et de bons frères, reliées par une communauté d’avenir partagé. La Chine entame la coopération avec l’Afrique d’une manière honnête et transparente. Elle n’y impose aucune condition politique et ne s’immisce jamais dans les affaires intérieures des pays africains. Les entreprises chinoises qui ont signé des accords et réalisé des projets avec succès en Afrique, possèdent des atouts en matière de qualité des produits et des travaux. Elles ont gagné leur réputation en Afrique, à travers les efforts inlassables des techniciens et des ingénieurs chinois. La coopération sino-africaine, marquée par la complémentarité des deux parties, les bénéfices mutuels, et les résultats tangibles, ne sera jamais perturbée par certaines forces visant à semer la discorde.
A l’Assemblée générale de l’ONU, le Président américain Joe BIDEN a dit que les Etats-Unis ne « cherchent pas une nouvelle guerre froide ou un monde divisé en blocs ». Pouvez-vous nous rassurer que la Chine et les Etats-Unis ne vont pas conduire le monde dans une confrontation qui mettra en péril la paix dans le monde ?
Comme le dit un proverbe chinois, quand on juge un homme, il faut écouter ce qu’il dit et voir ce qu’il fait. J’ai noté que lorsque le Président américain Joe BIDEN a fait son discours, les Etats-Unis ont pourtant annoncé un partenariat de sécurité trilatéral, « le AUKUS », avec le Royaume-Uni et l’Australie et un projet de coopération sur la technologie des sous-marins à propulsion nucléaire, suscitant ainsi de graves préoccupations de nombreux pays de la région. Un tel acte crée un bloc exclusif et attise la course aux armements. Non seulement est-il préjudiciable à la solidarité de la communauté internationale, mais encore il menace la paix et la stabilité de la région voire du monde entier.
La paix, le développement et la coopération gagnant-gagnant représentent le courant principal de notre époque. Une « nouvelle guerre froide » va à contre-courant de l’histoire et viole les intérêts fondamentaux des peuples du monde. Il y a quelques jours, le Président chinois XI Jinping a appelé, dans son discours au débat général de l’Assemblée Générale des Nations Unies, à mettre en pratique le véritable multilatéralisme, à préconiser le dialogue et l’inclusion, à renoncer la confrontation et l’exclusion et à rejeter les mentalités des blocs exclusifs et du jeu à somme nulle. Pour le Président XI Jinping, le monde est suffisamment grand pour permettre à tous les pays de se développer et de réaliser la prospérité ; les différences et les problèmes, difficiles à éviter, doivent être traités par voie de dialogue et de coopération sur la base de l’égalité et du respect mutuel.
La relation Chine-Etats-Unis est l’une des relations bilatérales les plus importantes dans le monde d’aujourd’hui. Cette année, le Président XI Jinping et le Président Joe BIDEN ont eu deux entretiens par téléphone et ont défini l’orientation du développement de la relation sino-américaine. La partie chinoise est prête à travailler avec la partie américaine, dans l’esprit de non-conflit, de non-confrontation, de respect mutuel et de coopération gagnant-gagnant, pour construire une relation de coordination, de coopération et de stabilité.
La Chine poursuit fermement la voie du développement pacifique et appelle les autres pays à le faire aussi. Elle ne cherche jamais à se développer au dépend des intérêts des autres, mais elle n’abandonne non plus ses droits et intérêts légitimes. Aucun pays ne doit s’attendre à ce que la Chine transige avec ses intérêts vitaux ou avale la couleuvre au détriment de sa souveraineté, de sa sécurité et de ses intérêts de développement. La Chine espère que les Etats-Unis pourront avancer dans le même sens avec elle pour défendre ensemble la paix, la stabilité et le développement du monde entier.
La Côte d’Ivoire a rompu avec Taiwan en 1983 pour établir des relations diplomatiques avec la Chine. 38 ans, comment se porte la coopération bilatérale entre les deux pays ?
Il n’y a qu’une seule Chine dans le monde. Le gouvernement de la République Populaire de Chine est l’unique gouvernement légal représentant toute la Chine. Taiwan fait partie intégrante du territoire chinois. Ces faits sont reconnus par les résolutions des Nations unies et constituent le consensus universel de la communauté internationale. En 1983, le Président Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, avec sa grande clairvoyance, a pris la décision politique de reconnaître le principe d’une seule Chine, de rompre les « relations diplomatiques » avec les autorités de Taiwan et d’établir les relations diplomatiques avec la République Populaire de Chine. Comme le démontrent l’histoire et la réalité, cette décision répond bien aux intérêts fondamentaux des deux pays et des deux peuples.
Depuis l’établissement des relations diplomatiques, les deux pays ont connu un développement régulier de leurs relations bilatérales et les deux peuples ont vu leur amitié s’approfondir davantage. Le développement des relations bilatérales était d’autant plus rapide depuis ces dix dernières années. La confiance politique mutuelle s’est renforcée sans cesse. Les deux pays se comprennent et se soutiennent mutuellement sur les questions touchant aux intérêts vitaux et aux préoccupations majeures de chacun. La coopération économique et commerciale a porté de nouveaux fruits. La Chine reste un principal partenaire financier de la Côte d’Ivoire avec un volume de financement d’environ 5 milliards de dollars américains. Selon des chiffres publiés par le Ministère de l’Economie et des Finances de Côte d’Ivoire, le décaissement effectué par la partie chinoise en 2020 s’est élevé à 233,42 milliards de francs CFA, soit près de 417 millions de dollars américains. Malgré les impacts de la COVID-19, les grands projets de coopération ont toujours connu des progrès. Plusieurs projets, comme l’extension et la modernisation du Port autonome d’Abidjan, la modernisation du réseau électrique et la construction du Stade olympique d’Ebimpé, ont été achevés et mis au service. D’autres projets, comme l’autoroute Tiébissou-Bouaké, la zone industrielle PK24 phase I, l’alimentation en eau potable dans 12 pays à l’intérieur du pays et les nouvelles usines de transformation du cacao à Abidjan, avancent dans d’heureuses conditions. Il y a aussi le projet du barrage hydroélectrique de Gribo-Popoli dont les travaux ont récemment commencé. En tant que partenaire important, la Chine a fait des efforts pour soutenir le développement économique et social de la Côte d’Ivoire.
Pouvez-vous nous dire quels sont les prochains projets que la Chine va financer en Côte d’Ivoire ?
La Côte d’Ivoire représente une locomotive de la croissance de la sous-région ouest-africaine. Le gouvernement ivoirien, sous la direction du Président Alassane OUATTARA, s’efforce de défendre la sécurité et la stabilité du pays et, tout en menant une riposte sanitaire efficace, de relancer l’économie avec des politiques de développement marquées par l’ouverture et l’inclusion. Le pays se dote d’une forte dynamique et d’un potentiel énorme. La partie chinoise attache une grande importance aux relations Chine-Côte d’Ivoire. Elle entend travailler activement avec la partie ivoirienne à approfondir la coopération dans les domaines traditionnels comme les infrastructures et à renforcer la coopération dans d’autres domaines tels que la santé, l’innovation numérique, l’économie verte, l’agriculture et surtout la transformation des produits agricoles. En outre, la Chine encourage ses entreprises et notamment ses entreprises privées à accroître leurs investissements en Côte d’Ivoire. J’ai pleine confiance en perspectives de la coopération sino-ivoirienne et je reste convaincu que, grâce aux efforts conjoints de part et d’autre, les relations d’amitié et de coopération entre les deux pays connaîtront un plus grand développement et bénéficieront davantage aux deux peuples.
Le Forum sur la coopération Chine-Afrique tiendra une nouvelle conférence avant la fin de l’année à Dakar, au Sénégal. La partie chinoise entend profiter de cette occasion à intensifier sa coopération avec la Côte d’Ivoire et les autres pays africains dans divers domaines et à apporter une nouvelle contribution à la construction d’une communauté d’avenir partagé Chine-Afrique encore plus solide.
Nomel Essis