Il suffit parfois d’un mot pour déshabiller tout un discours, pour réduire en miettes les apparats d’un personnage longtemps poli par les médias et les salons internationaux.
Le « cet imbécile de Banga » lancé par Tidjane Thiam n’est pas une simple maladresse verbale. C’est une carte d’identité morale, un aveu brut, de ce que l’homme retient quand le protocole cède.
Ce mot, brutal et méprisant, révèle ce que les discours calibrés ne disent pas. En réalité il s’agit d’un homme qui confond la contradiction avec l’injure et le débat d’idées avec le règlement de comptes.
Le problème n’est pas Arthur Banga, ni ses analyses, qu’on peut juger ou discuter.
Le problème, c’est qu’un aspirant à la magistrature suprême se sente autorisé à rabaisser publiquement un intellectuel par une insulte primaire.
Insulter :
c’est renoncer à convaincre.
C’est avouer son incapacité à répondre par des arguments solides.
C’est surtout manquer de respect à la République, qui repose sur l’affrontement des idées, pas sur la décapitation verbale de ceux qui les portent.
La Côte d’Ivoire vaut mieux que des colères d’ego
La Côte d’Ivoire, pays forgé dans la douleur des crises, ne mérite pas un chef qui insulte au lieu de rassembler.
Elle n’a pas besoin d’un homme qui, face au désaccord, brandit la gifle verbale comme un étendard.
Elle a besoin d’un dirigeant capable de hausser le débat, de parler avec dignité, de donner l’exemple à une jeunesse déjà trop habituée aux invectives des réseaux sociaux.
Quand un homme qui prétend gouverner perd son sang-froid devant une simple critique, comment se comportera-t-il devant une crise nationale, une opposition frontale, ou une contestation populaire ?
L’histoire récente nous enseigne qu’un chef d’État digne de ce nom se mesure à sa capacité à contenir sa colère, à répondre avec hauteur aux attaques les plus injustes.
Alassane Ouattara, qu’on l’approuve ou qu’on le conteste, n’a jamais cédé à la facilité de l’injure. Il a toujours démontré qu’il n’est pas seulement un esprit rigoureux, mais aussi une conscience morale. La grandeur d’un chef ne se mesure pas à la vivacité de sa riposte, mais à la dignité de sa parole. Un vrai leader unit par le verbe, il ne divise pas par l’invective.
L’illusion du vernis international
Ce qui rend cet épisode d’autant plus préoccupant, c’est le contraste saisissant entre le vernis mondain de Tidjane Thiam et la rudesse de ses propos.
Derrière l’allure policée du banquier distingué, se dévoile un tempérament abrupt, inapte à supporter la vérité qui dérange et réfractaire à l’épreuve salutaire de la contradiction démocratique.
Ce contraste est révélateur : on peut avoir dirigé de grandes banques sans jamais apprendre à diriger un peuple. Car les mots trahissent ce que l’apparence tente de cacher, avec Tidjane Thiam , l’élégance est de façade, l’orgueil est en vitrine.
Un masque arraché en direct
Un homme d’État se mesure au poids de ses mots. Celui qui insulte un professeur insultera demain un citoyen. Puis un adversaire.
Puis une nation entière qui ne partagerait pas ses vues.
La Côte d’Ivoire, forte de ses blessures et de ses renaissances, mérite mieux qu’un chef à la parole incendiaire.
Elle a besoin de bâtisseurs, pas de démolisseurs de dignité.
En qualifiant le professeur Arthur Banga « d’imbécile », Thiam n’a pas abaissé le professeur. Il s’est abaissé lui-même, révélant qu’un costume bien taillé ne suffit jamais à habiller la fonction de chef d’État.
Kalilou Coulibaly, Doctorant EDBA, Ingénieur