Dans sa déclaration du 6 novembre, aux allures de tragédie nationale, Laurent Gbagbo renoue avec son savoir faire du désordre : transformer la déraison en clairvoyance et présenter l’entrave au processus électoral dés législatives comme une profession de foi républicaine.
Sous prétexte d’un appel à la sagesse, Laurent Gbagbo rejoue la tragédie du chaos dont il fut l’auteur.
Evoquant les élections législatives, son refus de tout scrutin à court terme ne traduit pas une quête de paix, mais la volonté de prolonger un désordre qui demeure son unique respiration politique.
Ce discours se veut l’expression d’une conscience blessée. Il n’est en réalité que la récitation méthodique d’un homme incapable d’accepter que la République ait survécu à ses naufrages.
Laurent Gbagbo veut prolonger le désastre qu’il a semé
Chaque phrase, martelée avec la gravité d’un prêtre sans foi, trahit une obsession. Empêcher le temps de tourner sans lui. « Je suis contre l’élection à court terme » répète-t-il, comme on conjure un exorcisme politique.
Ce refus d’avancer n’a rien d’un sursaut de prudence ; il relève du pur calcul. Derrière la posture du martyr lucide se dissimule l’architecte du néant, incapable de bâtir et préférant maintenir la nation en apnée. Il ne poursuit pas la vérité, mais cherche à enfermer le pays dans le tribunal sans fin de blessures qu’il a lui-même provoquées.
Le sang versé à Nahio comme un étendard
L’ironie tragique est que Laurent Gbagbo se pose en gardien des morts qu’il a lui-même suscités.
Il parle de « couvertures des blessures », mais c’est lui qui, à Nahio comme ailleurs, a fait du sang des autres un drapeau. Il dresse des cimetières en arguments, des larmes en programmes. Le martyr devient ici monnaie politique, et la douleur un carburant électoral.
L’homme qui incendia la maison commune, la Côte d’Ivoire, prétend aujourd’hui interdire qu’on y rouvre les fenêtres.
Pyromane repenti de façade, il voudrait que la République reste en cendres pour qu’il continue d’y régner en prophète des ruines.
L’apotre du ressentiment
Ce discours relève moins d’une stratégie que d’un déni. A force de confondre mémoire et revanche, Gbagbo s’enferme dans la posture du justicier imaginaire, persuadé que l’État n’est légitime que lorsqu’il lui obéit.
Sa logique est celle du messianisme du ressentiment : il croit défendre la souveraineté du peuple alors qu’il ne défend que la nostalgie de son trône.
Le miroir brisé de la République
Ainsi, derrière le ton grave, se révèle le même Laurent Gbagbo d’hier et d’aujourd’hui : celui qui persiste à croire que la République doit se soumettre à ses plaies imaginaires et que la loi doit patienter au rythme de sa propre rédemption.
En vérité, la République n’a plus besoin de sa pitié. Elle a besoin fermeté, de vérité, d’institutions solides, non d’un prêcheur d’apocalypse en moraliste.
Le faux repenti et la vraie nation
Sous ses allures de vieil oracle, Laurent Gbagbo demeure le pyromane de Nahio, victime d’une amnésie choisie devant le souvenir du gendarme abattu à Adzopé, et toujours prompt à travestir la faute en innocence.
Il s’acharne à peindre sa défaite aux couleurs du deuil national et à faire de ses égarements des plaies communes. Mais la nation, fidèle à la mémoire de ses fils tombés pour rien, continue d’avancer non sur le sang qu’il brandit comme un étendard, mais sur la raison qu’il a renoncée à servir.
Kalilou Coulibaly, Doctorant EDBA, Ingénieur






































































