Abou Drahamane Sangaré s’en est allé samedi. A la différence de la plupart des cadres du FPI passés de vie à trépas ces derniers temps, il a succombé des suites d’une maladie et non d’un AVC.
La classe politique ivoirienne dans toute sa diversité est en train de lui rendre hommage. Elle salue la mémoire d’un homme de conviction, d’un être fidèle et loyal à son parti et à son maître à penser Laurent Gbagbo. Dans une vidéo qui tourne à plein régime sur la toile, Sangaré demande à ses camarades militants d’enjamber son corps pour continuer la quête de l’idéal pour lequel il s’est battu s’il lui arrivait de perdre la vie. Hélas !
Depuis le samedi, il a rejoint le royaume céleste. Le constat qui se dégage est qu’à titre posthume, il reçoit les hommages venant de tous les horizons. De son vivant, il était perçu comme le « gardien du temple », l’opposant le plus à gauche de la Gauche. Réconciliation avec le camp Affi N’Guessan ? Il a toujours dit non. Vote pour le référendum constitutionnel ? Il a balayé le processus du revers de la main. Participation au processus de réconciliation nationale tel que prôné par le gouvernement d’Alassane Ouattara ? En huit ans, il n’en a pas voulu. Recensement de la population pour la mise à jour du fichier électoral en tenant compte des nouveaux majeurs ? Il a dit Non. Participation du FPI aux élections législatives et locales ?
Sangaré a encore dit non. En tant que chef de file des GOR (Gbagbo ou rien), il a gardé la ligne jusqu’à sa mort. Aussi curieux que cela paraisse, à sa mort, on constate que des lignes sont en train de bouger chez ses ex-adversaires d’hier. Au grand mépris de la loi qui fait du camp Affi le détenteur exclusif du fanion du FPI, Henri Konan Bédié et Guillaume Soro ont salué la mémoire de Sangaré, «vice-président du FPI». Pour sûr, les funérailles qui s’annoncent fort tumultueuses seront un moment de grande clarification. Il n’est pas certain qu’Affi N’Guessan assiste muet à cette attitude de lèse-majesté.
Au FPI même, la disparition de Sangaré remet au goût du jour les intrigues de clans qui ont cours. Un communiqué signé par Assoa Adou a Paris, au nom de Laurent Gbagbo, présente les condoléances et suspend les activités du FPI. A deux semaines d’intervalles, le FPI a perdu l’ancien ministre N’Dori et l’ancien Directeur général du Port Marcel Gossio, deux pontes de la refondation. Aucun message de compassion de Gbagbo n’a été enregistré.
Ce qui laisse supposer que les autres deuils qui ont frappé le FPI ont laissé Gbagbo indifférent. Dans la maison bleue, ils sont nombreux à penser à de la manipulation au nom du célèbre prisonnier de La Haye. Une donne est certaine, une autre bataille pour le contrôle du parti n’est pas loin. Pendant que la vice-présidente Simone Gbagbo est à Abidjan et libre de tous ses mouvements, il est curieux que ce soit Assoa Adou qui, depuis l’extérieur, donne les orientations aux militants. Bref, on peut objectivement se tromper mais, il y a anguille sous roche. Les jours à venir nous situeront. En attendant, que Sangaré repose en paix. Adieu l’intrépide combattant !
Traoré Moussa