Il ne frappe pas du poing, il n’élève pas la voix, le droit se contente d’exister, fermement, avec cette autorité tranquille qui fait plier quiconque , quand il oublie que nul n’est plus haut que la loi.
Et soudain, face à lui, les titres s’effacent, les légendes s’effritent, ne reste que la rigueur nue du texte. Une République, ce jour-là, retrouve sa colonne vertébrale.
Ainsi, en va-t-il de la décision de la justice ivoirienne de rayer des listes électorales un certain Tidjane Thiam, disqualifié pour une formalité aussi élémentaire que le respect de son devoir civique. Ironie du sort, ce sont souvent les plus enclins à discourir sur la République qui en oublient les règles.
Une décision conforme au droit, et non à l’arithmétique politicienne
La radiation de M. Thiam des listes électorales n’est pas un acte d’hostilité politique, mais un retour à la source même du contrat républicain : voter est un droit, certes, mais un droit conditionné à l’inscription préalable sur les listes électorales.
En Côte d’Ivoire, comme dans toute démocratie organisée, ce droit suppose un acte volontaire, une démarche administrative personnelle. Qu’un homme qui aspire à présider la République ait omis, pendant plusieurs années, de se soumettre à cette exigence, ne relève pas de la simple distraction, mais d’un symptôme plus profond que celui d’un rapport distendu à la réalité locale et à l’exigence de participation civique.
L’élégance du droit, ou la beauté rigoureuse de l’impartialité
Il faut saluer ici une magistrature qui ne cède ni à l’illusion du nom célèbre, ni à la tentation de la complaisance. C’est dans ces décisions que la République se réaffirme.
La loi y apparaît non comme une camisole politicienne, mais comme la garante équitable du jeu démocratique.
En appliquant la règle commune à tous, même à un homme issu de la haute finance et de l’aristocratie politique, la justice a envoyé un message limpide : la République ivoirienne ne se gouverne ni par favoritisme, ni par lobbying international, mais par droit positif.
Le citoyen Thiam, une négligence devenue faute
Tidjane Thiam, en dépit de ses références académiques et professionnelles, semble avoir oublié que l’État ne se gère pas comme une salle de marché financier .
Son absence prolongée, son silence électoral, et sa réapparition messianique à l’orée des élections, font de lui non pas un candidat enraciné, mais un spectateur rentré trop tard dans la pièce.
En se plaçant au-dessus des obligations élémentaires de tout électeur, il s’est lui-même disqualifié, non par un complot, mais par un oubli dont il est seul comptable.
quand le CV supplante la carte d’électeur
Il serait tentant, pour certains, de crier à la manœuvre ou à l’exclusion politique. Mais n’est-ce pas là une façon assez commode de camoufler une incompétence administrative par une indignation factice ?
À ce rythme, il faudrait bientôt accepter que les diplômes de Polytechnique remplacent les extraits de naissance et que les expériences à crédit suisse dispensent de la preuve de résidence.
Or, la République ivoirienne n’est pas un cabinet de conseil, on y gouverne d’abord en en tant citoyen conforme à ses règles dont celle qui l’élimine une essentiellement serait reprochable à son grand père .
La légalité comme rempart contre les prophètes de circonstance
En définitive, la décision du tribunal n’est pas une sentence d’exclusion, mais un rappel.
Dans une République digne, nul n’est trop grand pour la loi, nul n’est au-dessus de la norme commune.
La justice ivoirienne, en élaguant le superflu et en sanctionnant l’omission, a défendu non une posture politique, mais l’essence même de l’égalité républicaine.
A Tidjane Thiam de méditer cette leçon : on ne reconquiert pas un peuple par des infographies et des postures, mais d’abord par une carte d’électeur bien tamponnée que l’on obtient, en ayant été régulièrement inscrit dans le fichier électoral .
Kalilou Coulibaly Doctorant EDB, Ingénieur