La rumeur courait depuis plusieurs semaines. C’est désormais officiel : Ahoua Don Mello, vice-président du PPA-CI chargé de la promotion du panafricanisme, sera candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2025. Une décision qu’il dit mûrement réfléchie, malgré les tensions au sein de son parti, le PPACI, « Je déposerai ma candidature. Mais j’espère qu’un dernier sursaut, un dialogue, aura lieu », a-t-il confié au confère Jeune Afrique. Mais qui est il réellement ?
Ingénieur des Ponts et Chaussées, enseignant-chercheur, technocrate, écrivain, militant de gauche, exilé politique et conseiller auprès de chefs d’État africains, Ahoua Don Mello a derrière lui un parcours dense, structuré autour d’un fil rouge : la souveraineté des peuples africains.
Né le 23 juin 1958 à Bongouanou, d’un père Agni et d’une mère Baoulé, il fait ses études primaires en Côte d’Ivoire, obtient le baccalauréat au Lycée Classique de Bouaké, puis intègre l’INPHB de Yamoussoukro où il décroche son diplôme d’ingénieur. Il poursuit ses études en France, à l’École nationale des Ponts et Chaussées de Paris, d’où il sort docteur-ingénieur à seulement 27 ans. Courtisé par les plus grands groupes internationaux, il refuse les offres en or faites aux États-Unis, au Canada ou en France pour revenir en Côte d’Ivoire. Un retour motivé par deux convictions : créer une société socialiste et prouver que l’Afrique peut inventer.
Il commence sa carrière comme enseignant-chercheur à l’INPHB, puis intervient dans plusieurs institutions, notamment le LBTP, l’Université de Cocody, l’École supérieure interafricaine de l’électricité de Bingerville ou encore l’Université du Burundi. En 1998, il devient directeur de la Technopole de Yamoussoukro. Sa rigueur, sa pédagogie et sa maîtrise des disciplines scientifiques lui valent le respect de ses étudiants, nombreux à occuper aujourd’hui des postes de responsabilité.
Proche de Laurent Gbagbo qu’il rencontre en France dans les années 1980, il participe à la création du FPI et milite activement dans les milieux de gauche. Il fonde le MIDD (Mouvement d’Initiative pour les Droits Démocratiques) et occupe divers postes de direction au sein du FPI, dont celui de secrétaire à l’organisation, président du comité de contrôle et conseiller du président du parti. En 2000, Gbagbo le nomme Directeur général du BNETD. Il transforme cette structure en pôle stratégique de développement, installe des représentations à l’étranger, initie des projets comme le transfert de la capitale à Yamoussoukro et expérimente le géo-pavé, symbole de l’innovation locale. Il siège aussi à la BNI, à la CAPEC, au Comité de privatisation, au Comité de pilotage du Grand Abidjan, entre autres.
Lors de la crise post-électorale de 2010, il est nommé ministre de l’Équipement et de l’Assainissement, et porte-parole du gouvernement Aké N’Gbo. Sa communication rassurante tranche dans un contexte tendu. Après la chute du régime le 11 avril 2011, il prend le chemin de l’exil. Pourtant, son expertise reste sollicitée : de 2017 à 2021, il est conseiller spécial du président guinéen Alpha Condé, avant d’être nommé en 2021 conseiller du Patronat russe pour les investissements en Afrique. Il rentre en Côte d’Ivoire le 9 octobre 2021, accueilli par de nombreux militants. Il réaffirme alors son engagement aux côtés de Laurent Gbagbo pour défendre le panafricanisme, la démocratie et la souveraineté.
Ahoua Don Mello est également un homme de plume. Il a publié deux ouvrages : L’Ivoirien Nouveau (2010) et Côte d’Ivoire, sur la route de la souveraineté (2015), dans lesquels il défend une vision lucide et engagée de l’avenir ivoirien. Marié à Rose Don Mello née Banchi, une entrepreneure ivoirienne, il parle couramment le français, l’anglais et l’espagnol.
Aujourd’hui, à 67 ans, il veut incarner une alternative au sein même de son parti, au nom d’un idéal toujours intact. Sa candidature pourrait bouleverser les équilibres de l’opposition et redonner voix à un courant souverainiste, panafricain et progressiste dans le débat national. Pour Ahoua Don Mello, l’heure n’est pas à la résignation, mais au réveil des consciences.
Fulbert Yao