L’actualité du cacao est marquée depuis quelques mois par une montée de tension entre les multinationales et les deux plus grands producteurs mondiaux de cacao. La Côte d’Ivoire et le Ghana ont engagé un bras de fer avec les géants de l’industrie du chocolat en 2018.
Leur objectif : mieux rémunérer les cacaoculteurs. Ces derniers ne touchent que 6% du prix de vente d’une tablette de chocolat. Tandis que les profits des multinationales se chiffrent en milliards de dollars. Les deux plus grands producteurs de cacao au monde sont africains. La Côte d’Ivoire (2,2millions de tonnes) et le Ghana (1 million de tonnes) produisent plus de 60% des fèves au niveau mondial. Le cacao fait vivre un cinquième de la population ivoirienne. Et 800.000 familles de producteurs en dépendent au Ghana. Face aux 130 milliards de dollars de recettes de l’industrie du chocolat. Les revenus du premier maillon de la chaîne sont insignifiants.
Au Ghana, les petits producteurs gagnent en moyenne 1 dollar par jour. En Côte d’Ivoire c’est encore moins ; 0.78 dollars par jour. Face à cette injustice, les pays producteurs ont décidé de durcir le ton. Pour peser davantage dans les négociations, ils se sont réunis au sein d’une « OPEP du cacao » en 2018. Un an plus tard, ils ont imposé une prime de 400 dollars par tonne de cacao qui s’ajoute au prix d’achat. Mais les acheteurs n’ont pas tenu leurs engagements. Certains ont même décidé de contourner le mécanisme sous prétexte de la baisse de la demande mondiale suite au Covid-19.
« Trois ans et demi passé après le Covid-19, malgré tous les éléments qui ont été mentionnés pour boycotter ce mécanisme. Toutes les entreprises impliquées dans le cacao ont donné des chiffres positifs. Des revenus records ont même été mentionnés par certains. Donc cela veut dire que le Covid-19 a été juste un argument. Donc pour nous le bilan est qu’il y a un manque de transparence », indique Alex Assanvo, Secrétaire exécutif Initiative Cacao Côte d’ivoire Ghana. En novembre 2022, Abidjan et Accra ont donc posé un ultimatum à l’industrie du Cacao. Ils ont menacé d’interdire l’accès aux plantations et de suspendre les programmes de durabilité.
Gages d’un cacao « durable et qualité » pour la consommation. Ce débat a lieu alors que le secteur se sépare à l’entrée en vigueur de nouvelles normes européennes. Elles ont pour objectif de lutter contre le travail des enfants et la déforestation. Depuis, les pays producteurs et multinationales ont renoué le dialogue. Mais les multinationales ont une autre carte à jouer. Elles pourraient se tourner vers les concurrents des deux leaders historiques du cacao. L’Equateur et le Brésil. Mais le Nigeria, le Togo et le Cameroun pourraient peser dans la balance.
« L’union fait la force comme nous l’avons démontré entre le Ghana et la Côte d’Ivoire. Et aujourd’hui avec d’autres pays qui vont nous rejoindre, cela va réduire les capacités de diversion des entreprises qui ne veulent pas jouer le jeu », ajoute Alex Assanvo. Dernièrement, le Directeur général du Conseil café cacao avait prévenu qu’il prendrait les mesures qui s’imposent. Yves Brahima Koné, le patron de l’organe régulateur du secteur a fermé l’accès à l’achat des fèves à une vingtaine d’acteurs, dont les multinationales Cargill, Barry Callebaut et Olam. Cette mesure est entrée en vigueur le 21 février dernier, a indiqué Kadoko Bamba, Directeur de la commercialisation extérieure.
Isaac K. avec J.A
N.B : Le titre, le surtitre et le chapô sont de la rédaction.