Candidat unique à sa propre succession, Zohoré Lassane, directeur général du groupe de presse Gbich Editions, a été plébiscité par ses pairs par acclamations à l’issue du 6e congrès ordinaire du groupement des Editeurs de presse de Côte d’Ivoire (GEPCI) tenu du 20 au 22 juin 2024 à Grand Bassam.
Voici ci dessous son programme d’actions consulté par l’infoexpress.
-SOUTENIR LA RÉSILIENCE DES ENTREPRISES DE PRESSE
Le modèle de management est certes la cuisine intérieure de chaque entreprise de presse, mais le GEPCI doit demeurer le grand animateur de notre secteur en jouant un rôle d’encadre ment et de formation continue en management à l’endroit des patrons de presse.
A cet effet, le GEPCI doit encourager les entreprises à se montrer inventives et entreprenantes pour sortir de cette situation précaire dans laquelle elles se trouvent. Il faut donc les encourager å se lancer dans la diversification en créant des activités annexes génératrices de revenus. Cela passe impérativement par un plan de relance lisible et réaliste par le biais de coachings en manage- ment ou de cabinets spécialisés.
Toutefois, le GEPCI doit prendre le contrôle des dossiers sensibles qui n’ont de chance d’aboutir que dans un cadre collectif. Il s’agit principalement de la DGI et la CNPS. À ce sujet, le GEPCI a déjà mené des démarches auprès de ces institutions et des acquis ont été obtenus. Entre autres la levée de la pression fiscale de la DGI et un moratoire moins contraignant des cotisations de la CNPS Ces dossiers étant particulièrement épineux, il faudra poursuivre le dialogue et la négociation afin d’obtenir l’annulation des pénalités liées aux retards de paiements. Puis, il faudra aussi se bat- tre pour obtenir une fiscalité spéciale pour le secteur de la Presse. Un objectif poursuivi par le GEPCI depuis quelques années et qui n’a pas encore abouti. Il faudra multiplier les lobbyings auprès des autorités.
Dès la fin du Congrès nous allons procéder à la mise en place d’un comité pour le plaidoyer en faveur de l’annulation des dettes fis- cales des entreprises de presse. Ce comité établira son calendrier de travail en rapport avec tous les partenaires du secteur.
RESTAURER ET MODERNISER LE RÉSEAU DE DISTRIBUTION
Sans doute le plus gros défi de ce second mandat. S’il est vrai que les entreprises de presse connaissent de graves difficultés de tous ordres, la principale demeure la distribution. Car tant que le réseau de distribution ne sera pas restauré ou entièrement reconstitué, tous les efforts qui seront entrepris pour relancer la presse resteront vains. Le modèle existant d’Edipresse ayant montré ses limites, il faudra repenser et améliorer le modèle actuel.
Avec le soutien de la tutelle et l’appui financier de l’ASDM, nous prendrons l’initiative à très court terme d’une grande concertation sur les défis liés à la distribution efficace des journaux. Une étude exhaustive devrait nous situer sur l’état actuel de la distribution afin d’y adresser des solutions définitives qui tiennent compte des réalités actuelles et des nouvelles habitudes de consommation. C’est à ce seul prix que les éditeurs de presse pourront envisager un avenir plus radieux pour leur secteur d’activité.
CONTINUER DE NÉGOCIER AVEC LA DGI
La situation fiscale auprès de la DGI constitue une très grosse épine dans le pied des entreprises de presse. C’est une situation préoccupante qui s’élèverait autour de 1,5 milliards de francs CFA. Au vu de l’état actuel alarmant de la presse, on s’interroge si elle pourra un jour faire face à ses obligations fiscales en accumulant ainsi des dettes d’année en année. Pour l’aider à sortir de cette spirale infernale et dans le souci de lui permettre de contribuer malgré tout à l’assiette fiscale, il apparaît urgent de mettre sur pied, un régime fiscal spécial dont elle pourrait s’acquitter. Pour cela, il faudrait mener un lobbying soutenu auprès du ministère de la Communication, du ministère du Budget et de la Direction générale des Impôts.
EXPLORER DE NOUVEAUX HORIZONS
S’il est vrai que notre secteur d’activité évolue sous la tutelle du ministère de la Communication, nous sommes avant tout des entreprises privées. Dépendant donc de la tutelle technique du ministère du Commerce et de la Promotion des PME Dans ce cadre, le GEPCI s’engage à saisir toutes les opportunités qu’offre cette institution en rejoignant la Confédération patronale unique des petites et moyennes entreprises (CPU-PME). Nous travaillerons à intégrer plus largement la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI), le Mouvement des Petites et Moyennes Entreprises (MPME) et la Chambre de commerce qui offrent de nombreuses opportunités et des perspectives intéressantes à leurs membres.
CRÉER UN ÉVÉNEMENT ET DES ACTIVITÉS PROPRES AU GEPCI
À l’instar du prix Ebony devenu une véritable institution, il appartient au GEPCI de se promouvoir et de se donner de la visibilité. Dans ce cadre, l’idée de mettre sur pied, un événement qui nous mettra en lumière est plus que d’actualité. Nous nous engageons à organiser dès cette année un événement dénommé « LES JOURNÉES DE L’ÉDITEUR ».
Nous nous engageons aussi à relancer « L’ÉCOLE DU GEPCI » en revisitant le fond et la forme pour ne pas créer de doublon avec ANP Academy, et « LA TRIBUNE DU GEPCI » qui a fait ses preuves par le passé.
METTRE SUR PIED, UNE PLATE-FORME DES OPM
Face aux défis à relever et aux combats à mener dans notre secteur il est utopique de penser qu’une seule organisation puisse y faire face. Il est donc impératif que toutes les organisations professionnelles qui œuvrent dans le domaine des médias puissent se re- trouver régulièrement dans un cadre permanent de travail pour échanger sur leurs problèmes communs de l’heure, dessiner en- semble des stratégies en jouant la carte de la solidarité pour affronter les défis à venir. Le GEPCI doit prendre le leadership d’une telle initiative. L’idée fait déjà son petit bonhomme de chemin car il y a eu des échanges avec le président de l’UNJCI. Dès la fin du Congrès nous comptons accélérer le processus en invitant toutes les parties prenantes dans l’optique de formaliser un cadre permanent de concertation qui respecte l’autonomie des organisations.
REDYNAMISER LE PORTAIL INTERNET
Le portail pressecotedivoire.ci est un excellent instrument qui devrait servir aux intérêts de tous les éditeurs de presse. Il reste cependant trop dépendant des fonds publics. Il apparaît donc impératif de repenser son rôle et ses objectifs afin de le rendre plus efficace et autonome. Si la stratégie générale est redéfinie en met- tant davantage l’accent sur l’aspect commercial, elle deviendra financièrement indépendante et constituera une source de revenus conséquente pour les entreprises de presse.
FORMER AUX ENJEUX ÉCONOMIQUES DU DIGITAL
C’est indéniable, le journal papier perd du terrain au profit du digital. Dans un monde où les habitudes de consommation ont considérablement évolué et où tout semble se dématérialiser, la presse n’a d’autre choix que de suivre le mouvement. Plutôt que de considérer le digital comme un problème, il faut l’intégrer comme une solution. Il faut dès à présent s’inscrire dans la transformation numérique:
– Innovation digitale: Promouvoir l’adoption des technologies numériques pour moderniser les opérations et atteindre un public plus large.
– Formation et accompagnement: Proposer des programmes de formation pour aider les éditeurs à maîtriser les outils numériques et à développer des compétences en marketing digital, SEO, et gestion des réseaux sociaux.
RAVIVER LA CONFRATERNITÉ ET LA SOLIDARITÉ
Le GEPCI organisera des sorties récréatives entre ses membres ou avec d’autres associations et initiera des réveillons de Saint-Sylvestre. Nous essayerons, dans la mesure du possible, d’initier des actions sociales avec des municipalités ou le District d’Abidjan.
MOBILISER DES RESSOURCES ADDITIONNELLES
Pour recapitaliser la presse imprimée ivoirienne et la rendre viable, il est essentiel de combiner des stratégies de diversification des re- venus, de modernisation des infrastructures, d’accès au finance ment, d’innovation technologique et de renforcement des compétences. En s’associant avec des institutions internationales et en sollicitant leur soutien, il est possible de mobiliser les ressources nécessaires pour revitaliser ce secteur crucial. En voici quelques-unes qui s’intéressent à la presse:
• UNESCO: Peut fournir un soutien technique et financier pour des projets visant à renforcer les capacités des médias et à promouvoir la liberté de la presse.
PNUD: Peut offrir des subventions et un soutien technique pour des initiatives de développement durable dans le secteur des médias.
• Fonds Africain de Développement (FAD): Peut soutenir des projets de développement économique et social, y compris ceux visant à renforcer les médias.
• ONG internationales: Des ONG comme Internews, Reporters sans Frontières (RSF), et le Centre International des Journalistes (ICFJ) peuvent offrir un soutien technique, des formations, et parfois des financements.
• Union Européenne (UE): Via ses programmes de coopération et de développement, l’UE peut offrir des financements et un sou- tien technique pour renforcer le secteur des médias.
• Fondations privées et philanthropiques: Des fondations comme la Fondation Bill & Melinda Gates, la Fondation Ford, et la Fondation Open Society peuvent offrir des subventions pour des projets spécifiques dans le secteur des médias
• Le Bureau ivoirien des droits d’auteurs pour ce qui concerne la copie privée.
NÉGOCIER AVEC LES GAFAM
Le lancement d’un plaidoyer auprès des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) pour obtenir un soutien financier est une démarche ambitieuse mais envisageable, surtout si la presse ivoirienne peut démontrer une valeur unique et proposer un modèle de collaboration bénéfique pour les deux parties. Voici quelques étapes et stratégies que le Groupement des Editeurs de Presse de Côte d’Ivoire envisage pour mener à bien cette dé marche:
• Préparation et Recherche
– Analyse de la situation actuelle: Documenter les difficultés fi- nancières actuelles, les revenus perdus à cause de la reproduction non autorisée, et l’impact sur la qualité et la diversité de l’information.
– Études de cas et précédents: Rechercher des exemples similaires où des groupes de presse ont réussi à obtenir un soutien des GAFAM, comme en France avec l’accord entre Google et les éditeurs de presse sur les droits voisins.
• Développement d’arguments convaincants
– Valeur unique de la presse ivoirienne: Mettre en avant l’importance de la presse ivoirienne pour la diversité culturelle et linguistique, et son rôle dans la démocratie et l’information des citoyens.
– Impact social et économique: Illustrer comment le soutien financier pourrait non seulement sauver des emplois et des entreprises locales, mais aussi renforcer le tissu social ivoirien.
• Proposition de modèles de collaboration
– Accords de licence: Proposer des accords de licence pour l’utilisation des contenus en ligne, où les GAFAM paieraient des redevances pour l’utilisation des articles.
– Partenariats publicitaires: Explorer des modèles de partage de revenus publicitaires ou des partenariats pour des projets spécifiques.
– Soutien à l’innovation: Demander des financements pour des projets d’innovation numérique dans la presse, comme le développement de nouvelles plateformes ou d’outils pour le journalisme d’investigation.
• Engagement et Sensibilisation
Mobilisation du public et des partenaires : Créer une campagne de sensibilisation pour obtenir le soutien du public et des partenaires locaux et internationaux.
-Lobbying: Travailler avec des experts en relations gouvernementales et des lobbyistes pour faire pression sur les GAFAM, en s’appuyant sur les régulations locales et inter- nationales sur les droits d’auteur et les droits voisins.
• Négociation
– Dialogues et rencontres: Organiser des réunions avec des représentants des GAFAM pour discuter des propositions et des attentes des deux parties.
– Transparence et communication: Maintenir une communication ouverte et transparente tout au long du processus pour éviter les malentendus et construire une relation de confiance.
• Suivi et Évaluation
Mise en place de mécanismes de suivi: Établir des indicateurs de performance pour évaluer l’impact du soutien financier et ajuster les stratégies en conséquence.
– Rapport d’impact: Publier régulièrement des rapports sur l’utilisation des fonds et les progrès réalisés grâce à ce soutien.
Fulbert Yao