C’est une sortie qui en valait le coup! En effet, face à la persistance des critiques et attaques de l’opposition, le président de la Commission Électorale Indépendante (CEI), Ibrahim Coulibaly Kuibiert, a choisi de passer à l’offensive plutôt que de rester simple observateur.
Et bien! A l’occasion d’une rencontre ce mercredi 16 avril 2025 avec les représentants des confessions religieuses, toutes obédiences confondues, au siège de l’institution à Cocody, Coulibaly Kuibiert a fait des révélations sur la question de l’audit demandée par l’opposition.
Il a rappelé justement qu’il s’agit dune revendication ancienne, remontant au moins à 2020.
Selon lui, le non-dit de cette demande réside dans la remise en cause de la liste électorale de 2008-2009, établie pour les élections de sortie de crise. L’argument avancé par certains partis serait la présence présumée de 2 à 3 millions de non-nationaux sur cette liste.
Pour étayer ses propos, il a expliqué que cette liste avait été élaborée de manière consensuelle, dans un esprit de sortie de crise, avec la flexibilité et le pragmatisme exigés par le contexte, tout en garantissant des garde-fous acceptés par toutes les parties.
« Ainsi, conformément à la circulaire prise en 2008 encadrant ladite opération (dont copie vous est remise), il avait été admis que certains pétitionnaires puissent s’inscrire avec un simple extrait de naissance. De même, ceux qui ignoraient les dates et lieux de naissance de leurs parents étaient également autorisés à s’enrôler », a-t-il précisé.
Les données recueillies devaient ensuite faire l’objet de croisements avec des fichiers dits « historiques ». Dès lors, selon le président de la CEI, il ne revient pas à la Commission d’exclure des électeurs au risque de remettre en cause les accords politiques conclus à l’époque.
« Nous ne pensons pas devoir le faire, et nous ne le ferons pas, par respect pour la paix, pour l’exécution de bonne foi des engagements pris et pour la continuité de l’administration républicaine », a-t-il insisté.
Selon Kuibiert, si la CEI devait accéder à l’audit demandé par l’opposition, il faudrait au préalable en définir les règles. Car ce qui est visé, semble-t-il, serait la radiation de certains électeurs sur la base de l’article 3 du Code électoral relatif aux conditions d’inscription, ou la rectification de données au regard de l’article 7, portant sur les mentions d’identification.
Pour l’heure, la CEI met en œuvre l’audit prévu par le Code électoral : celui qui s’inscrit dans le cadre du contentieux de la liste électorale. Ce contentieux permet, preuves à l’appui, de demander : la radiation d’électeurs indûment inscrits ; l’inscription de personnes indûment écartées ; la correction d’erreurs matérielles ou d’irrégularités.
Sur Les supposées violations de l’article 7. Kuibiert a indiqué que depuis quelques semaines, après avoir réclamé une nouvelle RLE avant la présidentielle de 2025, l’opposition accuse désormais la CEI d’avoir laissé subsister des irrégularités massives sur la liste électorale. Celle-ci comporterait, selon elle, des personnes décédées, des mineurs et plus de 6 millions d’électeurs aux données incomplètes.
« Cette question n’est pas nouvelle. Déjà en 2023, à la suite de la publication de la LEP (Liste Électorale Provisoire), le PDCI-RDA et le PPA-CI avaient saisi la CEI par lettres officielles pour dénoncer des irrégularités. », a martelé le magistrat.
Selon lui, La CEI avait convié ces partis à plusieurs séances de travail, notamment une longue réunion tenue le samedi 15 juillet 2023 à l’espace Latrille Events, de 10h30 à 17h. Lors de cette réunion, à laquelle avaient été invités RHDP, PDCI-RDA, LMP, PPA-CI, GP-PAIX, MGC, AFD, AIRD, UDCY, AID et LIDER, les commissaires centraux et techniciens de la CEI avaient présenté des éléments biométriques (empreintes, photos) et alphanumériques (fiches, pièces d’identité) pour répondre aux accusations.
« Nos partenaires politiques semblaient satisfaits à l’époque. Nous sommes donc surpris du retour de cette préoccupation», a-t-il déclaré.
Il reconnaît que certaines irrégularités peuvent être imputées à la CEI, mais d’autres relèvent de l’origine même de la liste électorale ou des faiblesses de l’état civil ivoirien.
Deux remarques finales ont été formulées : L’absence d’une mention exigée par l’article 7 du Code électoral ne constitue pas en soi un motif de radiation. Seuls les motifs suivants peuvent justifier une radiation : décès, non-respect des conditions de nationalité, de l’âge requis, ou perte des droits civils et politiques.
Les mentions exigées par l’article 7 ont une portée parfois surestimée. Leur absence sur la liste n’affecte pas nécessairement sa sincérité, l’objectif principal étant d’identifier l’électeur. En ce sens, l’identification biométrique mise en place depuis 2008 est jugée suffisante.
« L’objectif de cette campagne menée contre nous semble être le discrédit, par tous les moyens, de la Commission Électorale Indépendante. Cela n’est pas acceptable. », a conclu le président.
A noter qu’au cours de la conférence de presse, le Kuibiert a présenté l’organisation et le fonctionnement de la CEI, en lien avec la question de son indépendance. Il a particulièrement insisté sur le sujet de la liste électorale, notamment la Révision de la Liste Électorale (RLE) demandée par plusieurs partis politiques.
Fulbert Yao