Le prix du kilogramme de la viande bovine ne diminuera pas de sitôt. Les acteurs de la filière bétail et viande redoutent une hausse du prix sur le marché. Et ce, du fait de la tournure que prend le désordre dans le milieu.
Si rien n’est fait pour assainir la filière bétail et viande, le prix du kg de viande de bœuf qui coûte 2200 F Cfa, 2300 F Cfa, 2400 F Cfa respectivement aux grands marchés de San-Pedro, de Treichville et Agboville, risque à nouveau de grimper. Une hausse qui risque de donner du fil à retordre aux ménagères et adeptes du régime carné. Fin avril dernier, Barry Babilé, le Secrétaire général de la Fédération nationale des associations et coopératives de la filière bétail et viande de Côte d’Ivoire (Fnacfbvci) déplorait, au cours d’une conférence de presse à Treichville, les pratiques illégales au sein de la filière qui contribueront à renchérir le prix du bétail et de la viande sur les marchés.
Il s’agit des faux frais sur le convoyage imposés aux frontières du Mali et du Burkina-Faso via un guichet unique, les tracasseries routières et perceptions illicites opérées par certaines organisations professionnelles de la filière à l’insu du ministère du Commerce. Faut-il le souligner, la pratique du convoyage des camions de bétail, est officiellement interdite depuis 2012. Joint, récemment, au téléphone, le porte-parole de la Fnacfbvci nous révèle que ces pratiques sévissent encore. Et pire, dira-t-il, il y a eu des tractations suite au blocage de camions de bœufs, la semaine dernière dans les corridors de Bouaké et de Bouna. « Comme l’Etat a interdit le convoyage, ils effectuent tous les prélèvements à partir de Zegoua, à la frontière du Mali. Là bas, les commerçants déboursent 80 à 90.000 F Cfa par camion, dont 30.000 F Cfa pour une assurance fictive destinée aux bouviers.
Ce n’est pas officiel puisque nos commerçants disent qu’ils ne reçoivent pas de reçus. Une fois sur le territoire ivoirien, à partir de Pogo, ils te collent le macaron à 10.000 Fcfa. C’est clair que si toutes ces pratiques illégales ne s’arrêtent pas les commerçants vont augmenter le prix du bétail, affirme le secrétaire général de la fédération qui revendique 300 membres repartis en 16 sociétés coopératives au niveau du district d’Abidjan et 7 à l’intérieur du pays. Les acteurs sont composés d’éleveurs, de commerçants et des bouchers. « Nous avons déjà informé les autorités compétentes par courrier. Mais cette pratique sévit toujours. Nous leur demandons encore une fois, de prendre cette question à bras-le-corps, pour mettre fin au convoyage », déplore Barry Babilé.
Le ministère du Commerce est pourtant informé
Ces dysfonctionnements au niveau de l’acheminement du bétail ne sont pas méconnus de la tutelle. L’année dernière à la veille de la Tabaski, suite aux nombreuses plaintes des acteurs de la filière bétail et viande, le gouvernement ivoirien avait pris des mesures pour supprimer les faux frais sur le convoyage des ovins et des bovins. Le Directeur Général du Commerce intérieur, Aimé Koizan, avait même réitéré cette assurance. «Le gouvernement a en effet décidé de renforcer la sécurisation des routes d’approvisionnement en bétail depuis les postes frontaliers jusqu’aux marchés terminaux, d’organiser des patrouilles régulières de l’observatoire de la fluidité des transports et de l’unité de lutte contre le racket afin de lutter contre les tracasseries routières, de démanteler tous les postes de contrôles illégaux, de renforcer le dispositif des forces de l’ordre pour désengorger les voies d’accès à l’abattoir de Port-Bouët et d’assurer la sécurité des sites de commercialisation. Par conséquent, tous les opérateurs économiques sont invités au respect des dispositions du présent communiqué sous peine de sanctions conformément à la réglementation en vigueur», avait-il indiqué. A l’en croire, seuls les frais liés au contrôle sanitaire des animaux aux postes frontaliers sont autorisés. Ces montants s’élèveraient à 150 F Cfa par tête d’ovin et 250 F Cfa par tête de bovin. Ce qui donne droit à la délivrance d’un laissez-passer sanitaire par les services vétérinaires. Mieux, Aimé Koizan, rappelait que le bétail fait partie des produits du cru qui ne sont soumis à aucune taxation ou prélèvement dans la zone de l’Union économique ouest africaine (UEMOA). Malgré toutes ces dispositions, le phénomène persiste. Une énième augmentation du prix de la viande ne devrait donc pas surprendre.
Isaac Kroman