Ce 29 mai 2025, la Banque africaine de développement (BAD) élira son nouveau président. Cinq candidats, sont en lice pour succéder à Akinwumi Adesina. Voici la biographie de chacun d’eux.
Samuel Munzele Maimbo (Zambie)
Actuellement vice-président chargé du budget, de l’évaluation des performances et de la planification stratégique à la Banque mondiale depuis juillet 2023, Samuel Munzele Maimbo est un technocrate chevronné, fort de près de 30 ans d’expérience dans le financement du développement, la mobilisation de ressources et la planification stratégique.
Originaire de Zambie, Maimbo a débuté sa carrière comme inspecteur bancaire à la Banque de Zambie, avant de rejoindre PricewaterhouseCoopers en tant qu’auditeur. Il intègre la Banque mondiale en 2001 via le programme des jeunes professionnels, gravissant les échelons pour occuper des postes stratégiques, notamment : Chef de cabinet des présidents de la Banque mondiale.
Directeur du département de mobilisation des ressources de l’Association internationale de développement (IDA).
Directeur des finances d’entreprise de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD).
Il a notamment supervisé la reconstitution des ressources de l’IDA20, atteignant un montant record de 93 milliards de dollars, dont plus de 70 % ont été alloués à l’Afrique .
La candidature de Maimbo repose sur une vision ambitieuse visant à transformer la BAD en un catalyseur de développement inclusif. Ses priorités incluent :
La création d’emplois pour les jeunes et les femmes
Le développement du capital humain, avec un accent sur l’éducation et la formation professionnelle
L’investissement dans les territoires fragiles pour réduire les inégalités régionales
L’accès universel à l’énergie, en promouvant les sources d’énergie durables
Le renforcement des chaînes de valeur agricoles et la promotion de l’intégration commerciale transcontinentale
Il envisage également de réhabiliter la fonction de chef économiste au sein de la BAD, afin de mieux orienter les politiques économiques en s’appuyant sur le savoir africain .
Soutiens et positionnement
Maimbo bénéficie du soutien de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA), ainsi que de plusieurs chefs d’État de la région . Sa candidature est également perçue favorablement par certains actionnaires non africains de la BAD, notamment les États-Unis, qui détiennent 6,5 % des droits de vote.
Amadou Hott (Sénégal)
Né le 25 octobre 1972 à Thiaroye Gare, au Sénégal, Amadou Hott est un économiste et financier sénégalais, reconnu pour son expertise en financement structuré, en développement des infrastructures et en finance climatique. Il est marié et père de trois enfants.
Après avoir obtenu son baccalauréat en 1992 au lycée Seydina Limamoulaye de Guédiawaye, Hott poursuit ses études en France. Il obtient un DEUG en mathématiques appliquées à l’économie à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg, puis une licence et une maîtrise en sciences économiques, option monnaie-finance, à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il y complète également un DEA en finance de marché et gestion bancaire. En 1999, il participe à un programme d’échange à l’Université de New York, où il suit des cours en mathématiques financières.
Amadou Hott débute sa carrière en 1998 à la Société Générale à New York, avant de rejoindre BNP Paribas à Londres en tant que banquier d’investissement. Il travaille ensuite à ABN AMRO Bank à Londres, se spécialisant dans les opérations liées à l’Afrique. En 2006, il s’installe à Dubaï pour occuper le poste de directeur général des fusions-acquisitions et du financement pour l’Afrique à Millennium Finance Corporation. En 2008, il devient directeur général de UBA Capital à Lagos, la filiale de banque d’investissement du groupe UBA.
En 2011, Hott fonde Afribridge Capital, une société d’investissement et de conseil basée à Dubaï, ciblant le continent africain. Il y conseille notamment le groupe nigérian Dangote, contribuant à la création de Dangote Capital, qu’il pilote.
En 2012, Hott est nommé conseiller spécial du président sénégalais Macky Sall, chargé des questions de financement et d’investissement. Il préside le conseil d’administration de l’Aéroport international Blaise-Diagne (AIBD) et devient le premier directeur général du Fonds souverain d’investissements stratégiques (FONSIS), qu’il met en place. Sous sa direction, le FONSIS lance plusieurs projets dans la production d’énergie solaire, la santé, l’agriculture, l’hôtellerie et l’industrie pharmaceutique.
En novembre 2016, Hott est nommé vice-président de la BAD, en charge de l’électricité, de l’énergie, du climat et de la croissance verte. Il crée le Complexe Énergie, Énergie, croissance verte et changement climatique, recrutant les directeurs et développant les opérations avec le secteur privé.
Sous son mandat, la BAD augmente considérablement ses investissements dans les énergies renouvelables, atteignant 100 % des investissements dans la production en 2017. Il lance des programmes phares tels que « Desert to Power », l’Alliance financière africaine sur le changement climatique et la « green baseload » dans le cadre du programme SEFA 2.0.
En avril 2019, Hott est nommé ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération internationale du Sénégal. Il est chargé de préparer et d’appliquer la politique économique et financière du pays, de planification du développement, de population, de statistiques, de coopération et de développement du secteur privé et des partenariats public-privé. Il quitte ce poste en septembre 2022.
En décembre 2022, Hott est nommé envoyé spécial du président de la BAD pour l’Alliance pour l’infrastructure verte en Afrique (AGIA). Il est chargé de mobiliser les ressources pour soutenir la transition de l’Afrique vers des émissions nettes nulles en investissant dans les infrastructures vertes. Il quitte ce poste en septembre 2024 pour se porter candidat à la présidence de la BAD .
Amadou Hott parle couramment le français, l’anglais, le peul et le wolof. En 2012, il est nommé « Jeune leader mondial » par le Forum économique mondial.
Sidi Ould Tah (Mauritanie)
Né à Mederdra, en Mauritanie, Sidi Ould Tah est un économiste et homme politique chevronné, reconnu pour sa discrétion et son efficacité. Titulaire d’un doctorat en sciences économiques de l’Université de Nice Sophia Antipolis, il a également obtenu un DEA en économie à l’Université Paris VII. Il a débuté sa carrière à la Banque mauritanienne pour le développement et le commerce, avant d’occuper des postes stratégiques au sein de la municipalité de Nouakchott et du Port autonome de la capitale. En 1996, il rejoint l’Autorité arabe pour l’investissement et le développement agricole à Khartoum, puis la Banque islamique de développement en Arabie saoudite. De retour en Mauritanie, il est nommé conseiller à la présidence, puis ministre des Affaires économiques et du Développement de 2008 à 2015.
Depuis 2015, il préside la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), où il a transformé l’institution en multipliant par dix ses engagements annuels, atteignant 2,2 milliards de dollars en 2023. Sous sa direction, la BADEA a émis son premier eurobond de 500 millions d’euros en 2024 et a lancé un plan stratégique 2025-2030 doté de 18,4 milliards de dollars, axé sur les infrastructures, le soutien aux PME et les investissements stratégiques.
Sa candidature à la présidence de la BAD repose sur quatre piliers : la résilience climatique, la diversification économique, l’inclusion des jeunes et des femmes, et la mobilisation de financements innovants. Il prône une réforme de l’architecture financière africaine, l’intégration du secteur informel et l’utilisation des technologies émergentes comme la fintech et la blockchain.
Sur le plan diplomatique, Sidi Ould Tah bénéficie du soutien de plusieurs pays, dont la Côte d’Ivoire, le Congo-Brazzaville, la Tunisie, le Nigeria, l’Italie et le Bénin. Sa campagne, orchestrée avec discrétion, s’appuie sur des alliances stratégiques et une vision panafricaine du développement.
En reconnaissance de son impact dans le secteur financier africain, il a été élu « Financier de l’année 2025 » lors des Financial Afrik Awards.
Mahamat Abbas Tolli (Tchad)
Né en avril 1972 à Abéché, Mahamat Abbas Tolli est un haut fonctionnaire et économiste tchadien, reconnu pour son expertise en gouvernance financière et en réformes institutionnelles. Titulaire d’un baccalauréat en administration des affaires de l’Université du Québec en Outaouais et diplômé de l’École nationale d’administration (ENA) de Paris, il a occupé plusieurs postes clés au sein du gouvernement tchadien, notamment ministre des Finances et ministre des Infrastructures et de l’Équipement.
Abbas Tolli a débuté sa carrière en tant que directeur général des Douanes et des Droits Indirects du Tchad en 2001, avant de devenir directeur du cabinet civil du président en 2003. Il a ensuite été nommé ministre des Finances en 2006, puis ministre des Infrastructures et de l’Équipement en 2011.
Au niveau régional, il a été secrétaire général de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) en 2008, puis président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) de 2015 à 2017. En février 2017, il est nommé gouverneur de la BEAC, poste qu’il occupe jusqu’en février 2024.
Sous sa gouvernance, la BEAC a entrepris plusieurs réformes majeures :
Modernisation des systèmes informatiques et de la gouvernance de la banque.
Augmentation des réserves de change, passant de moins de 4 milliards de dollars à environ 18 milliards de dollars, évitant ainsi une dévaluation de la monnaie.
Mise en place d’une nouvelle réglementation des changes, obligeant les sociétés pétrolières et minières à rapatrier l’intégralité de leurs recettes, augmentant la transparence dans le secteur.
Dynamisation du marché obligataire de la zone CEMAC, avec un encours de titres publics passant de 916 milliards de FCFA en 2016 à 6 413 milliards de FCFA en 2023.
En mars 2024, Abbas Tolli est officiellement désigné candidat unique de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) à la présidence de la BAD. Sa candidature est également soutenue par la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC).
Il propose une vision axée sur :
L’accélération des réformes institutionnelles de la BAD.
Le renforcement de la capacité financière de la banque pour soutenir des projets ambitieux.
La promotion de l’industrialisation de l’Afrique et la transformation locale des matières premières pour créer des emplois et renforcer les économies nationales.
Malgré ses réalisations, Abbas Tolli a été au centre de controverses, notamment en 2023, lorsqu’il a été accusé de favoritisme dans le cadre d’un concours de recrutement à la BEAC, impliquant des proches, y compris son épouse. Cette affaire a suscité des tensions au sein de l’institution.
De plus, certains observateurs estiment que la présence de Moussa Faki Mahamat, également tchadien, à la tête de la Commission de l’Union africaine depuis 2017, pourrait jouer en défaveur de la candidature de Tolli, en raison d’une volonté d’équilibrer les représentations régionales au sein des institutions africaines.
Bajabulile “Swazi” Tshabalala (Afrique du Sud)
Seule femme en lice pour la présidence de la BAD en 2025, Bajabulile “Swazi” Tshabalala incarne une candidature axée sur l’inclusion sociale, l’égalité de genre et le renforcement des partenariats public-privé. Forte d’une carrière de près de 30 ans dans la finance et la gestion, elle propose une vision de la BAD tournée vers l’impact social et la transformation économique du continent.
Née à Soweto, en Afrique du Sud, Swazi Tshabalala a obtenu une licence en économie à l’Université Lawrence en 1989, puis un MBA à l’Université Wake Forest en 1992. Elle a débuté sa carrière dans le secteur privé, occupant des postes de direction chez Old Mutual Employee Benefits et Standard Bank Group. Elle a ensuite rejoint Transnet SOC, où elle a été directrice adjointe puis directrice de la trésorerie, avant de devenir directrice générale des services institutionnels, supervisant la transformation de Portnet en Transnet National Ports Authority. Elle a également été PDG du groupe IDG et directrice exécutive de Barbican Advisory Group, offrant des services de conseil en finance et en ingénierie. En 2018, elle rejoint la BAD en tant que vice-présidente des finances et responsable financière, avant d’être nommée vice-présidente principale en 2021, devenant ainsi la première femme à occuper ce poste stratégique .
Swazi Tshabalala envisage une BAD servant de pont entre le secteur privé et les gouvernements, afin de catalyser les investissements et de promouvoir un développement inclusif. Elle met l’accent sur l’égalité de genre, le soutien aux populations défavorisées et la création d’emplois pour les jeunes. Sa stratégie repose sur l’intégration des considérations sociales dans les politiques économiques et le renforcement des partenariats public-privé pour stimuler la croissance.
Sa candidature est soutenue par le gouvernement sud-africain, qui voit en elle une figure capable de renforcer les relations entre l’Afrique du Sud et les autres pays africains dans le cadre du développement économique . En tant que seule femme candidate, elle bénéficie également du soutien des mouvements en faveur de l’égalité de genre et de la représentation féminine dans les institutions internationales.