L’Epp Agban situé au quartier Banco 1 dans la commune d’Attecoubé n’est plus que l’ombre de lui-même. Ce temple du savoir qui était, il y a quelques jours, un établissement scolaire normal avec des élèves et des enseignants, n’existe désormais que de nom. Il s’est transformé en un refuge pour les habitants dont les maisons ont été détruites.
Seul bâtiment debout au milieu des tas de gravats étendus à des km à la ronde, il offre hélas un décor moins reluisant. Il est devenu un espace plus que insalubre. Aujourd’hui, on y trouve des débris de fauteuils, des morceaux de brique, des vêtements, des tôles éparpillées ici et là, quelques feuilles de légumes jonchent le sol et des arbres fauchés par les bulldozers.
La cour est devenue un vaste espace de cuisine collective. Il y a ceux qui coupent les légumes, d’autres qui les font cuire au feu de bois.Ce lieu qui était autrefois un espace de jeux et de cris joyeux, est devenu l’épicentre de la résilience de la communauté déguerpie.Des groupes de personnes s’affairent dans toutes les directions, créant une ruche d’activité qui ne semble jamais s’arrêter.
Aussi, des personnes du troisième âge,des jeunes et des enfants sont installés et pensifs. Les salles de classe ont été modifiées en logement de fortune.Des matelas, nattes, ustensiles de cuisine, des meubles qui en restent du déguerpissement y sont mis à l’abri. Loin des pluies et des scélérats qui ne se lassent pas de dérober des biens à ces personnes rendues vulnérables. On y dort à la nuit tombée dans l’espoir d’un lendemain meilleur.
A en croire, I. B. natif du village Agban, plusieurs familles n’ont pas eu d’autres choix que de trouver demeure à ce lieu pour le moment. Selon lui, cette situation met des milliers de personnes dans la précarité. Dans un coin de la cour à quelques mètres du portail d’entrée, des jeunes gens sont alignés autour d’un homme d’une quarantaine d’années. Ce dernier, nommé K. Ange vient en aide aux riverains comme il le peut. « Cette situation est inhumaine et inadmissible dans un pays de loi », lance-t-il désespéré. Il a en gros sur le cœur et trouve déplorable qu’on en arrive à ce niveau d’insensibilité : « comment peut-on détruire un village comme un vulgaire quartier. Sans approcher au préalable la communauté villageoise et ses habitants. Aucune mesure d’accompagnement n’a été prise pour les populations. Ce village existe depuis 1895 et un jour, il est démoli sans aucune politique sociale. D’autres personnes ont été réveillées de leur sommeil par les machines. C’est vraiment horrible ». Poursuivant, il a révélé qu’aucun habitant n’a été approché de près ou de loin par une autorité de ce pays. Face à cette problématique, les déguerpis ont décidé de faire valoir leurs droits aux dires de K. Ange. « Nous recensons les propriétaires de terre et les locateurs. Ce, afin d’aller voir qui de droit pour nous rendre justice », explique-t-il. A sa suite, une femme d’une trentaine d’année est désespérée. « On se sent abandonné », s’écrit une jeune dame, triste, implorant tous les dieux pour lui venir en aide. Puis, ajoute-t-elle, comment peut-on laisser femmes, enfants et hommes dans cette situation. Cet établissement scolaire reste le seul soulagement pour des familles qui ne savent pas où aller.
Ange Sarah