Dans cette interview, la présidente de la Fondation Boikari Fofana lève un coin du voile sur les projets, le mode de financement et les cibles de cette organisation créée pour perpétuer les actions de « l’ingénieur » de la structuration de la communauté musulmane en Côte d’Ivoire.
Quelles sont les motivations de la création de la Fondation Cheick Boikari Fofana ?
La Fondation Cheick Boikari Fofana a été créée pour honorer sa mémoire, perpétuer son héritage et poursuivre son engagement envers la communauté musulmane, en particulier celle d’Afrique. Ses motivations principales sont les suivantes. Premièrement, préserver l’héritage spirituel et intellectuel. La Fondation vise à transmettre les enseignements du Cheick Boikari Fofana, notamment en matière de foi, d’éducation et d’éthique, pour inspirer les générations futures à s’engager activement dans la société tout en respectant leurs valeurs religieuses.
Deuxièmement, promouvoir l’éducation. La fondation s’efforce de sensibiliser et de soutenir les jeunes musulmans dans leur parcours éducatif, cherche à renforcer leur réussite académique et professionnelle tout en les aidant à concilier ambition et foi. Cela passe par des initiatives telles que des conférences, des séminaires et des programmes éducatifs adaptés. Troisièmement, contribuer au développement de la communauté. La fondation prévoit d’organiser des formations, des activités de sensibilisation, et des événements pour renforcer les compétences des jeunes et promouvoir un sentiment de responsabilité envers leur communauté et la société en général. Enfin, construire des infrastructures et apporter un soutien à la communauté. Avec des projets comme la construction de son siège incluant un amphithéâtre, une bibliothèque, des salles de formation et de prière, la fondation vise à offrir un lieu de rassemblement et de ressources pour la communauté, favorisant le dialogue et la formation continue.
En somme, la Fondation représente un pont entre tradition et modernité, servant de plateforme pour perpétuer les valeurs du Cheick Boikari Fofana et soutenir un développement harmonieux des jeunes musulmans dans leurs aspirations personnelles et professionnelles.
Est-ce un vœu du Cheick ou une manière de perpétuer les actions de celui qui a façonné l’organisation de la communauté musulmane en Côte d’Ivoire et même dans la sous-région ?
La création de la Fondation Cheick Boikari Fofana répond à la fois à un désir de perpétuer les actions et l’héritage du Cheick, et aussi, à son aspiration profonde de voir la communauté musulmane progresser dans la connaissance et la responsabilité.
Bien que le Cheick lui-même n’ait peut-être pas exprimé explicitement la volonté de fonder une organisation de ce type, il a laissé un héritage clair en matière d’engagement pour l’éducation, la foi et le développement communautaire.
Le Cheick Boikari Fofana a consacré sa vie à structurer et à organiser la communauté musulmane en Côte d’Ivoire et au-delà. Il a œuvré pour qu’elle puisse se développer de manière autonome et responsable, tout en valorisant les principes islamiques de solidarité, de savoir et de bienfaisance. La fondation a donc pour but de prolonger cet effort et d’assurer que son travail ne s’éteigne pas avec sa disparition.
En établissant cette fondation, ses héritiers et la communauté souhaitent honorer cet engagement et offrir une structure qui soutient durablement les jeunes générations. C’est ainsi une manière d’immortaliser les actions du Cheick et de veiller à ce que son message de foi et de responsabilité communautaire reste vivant, et serve de boussole pour les musulmans d’aujourd’hui et de demain.
Le secteur éducation formation constitue un des volets importants de la Fondation. Pourquoi ce choix ?
Le choix du secteur de l’éducation et de la formation comme pilier de la Fondation Cheick Boikari Fofana découle de l’importance qu’il accordait à la connaissance et à l’instruction. Il considérait que l’éducation est un levier fondamental pour l’épanouissement individuel et le progrès collectif. En intégrant ce volet, la fondation vise plusieurs objectifs. Notamment encourager l’excellence académique : Le Cheick Boikari Fofana croyait que l’accès à une éducation de qualité permettrait aux jeunes musulmans de mieux réussir dans leur vie personnelle et professionnelle. La fondation veut ainsi motiver et accompagner les jeunes dans leur parcours scolaire et académique, en leur fournissant les ressources et le soutien nécessaires pour exceller. Ce soutien se traduit par des bourses, des prix d’excellence, des ateliers de renforcement de compétences, et des programmes de mentorat pour les guider dans leurs études et leur orientation professionnelle.
Ensuite préparer des leaders et acteurs engagés : La formation ne vise pas seulement la réussite individuelle mais aussi le développement de leaders capables de contribuer positivement à l’épanouissement de leur communauté. En favorisant une éducation alliant compétences académiques et valeurs éthiques, la fondation aspire à former des individus qui deviendront des modèles inspirants, prêts à servir leur communauté et à promouvoir des valeurs de paix, de solidarité et de justice.
Tertio, promouvoir l’apprentissage tout au long de la vie : Inspirée par la vision du Cheick Boikari Fofana, la fondation encourage la poursuite continue du savoir et l’amélioration personnelle. Elle cherche à instaurer chez les jeunes et les adultes une culture de l’apprentissage permanent, qui est valorisée dans l’Islam, en proposant des formations adaptées aux besoins évolutifs du marché du travail et aux exigences de la société moderne.
Enfin, faciliter l’intégration dans la société tout en conservant son identité religieuse : un des défis majeurs pour les jeunes musulmans est de réussir académiquement et professionnellement tout en restant fidèles à leurs valeurs. Le volet éducatif de la fondation intègre donc des programmes qui aident les jeunes à concilier foi et ambition, leur permettant d’avancer avec confiance dans un monde moderne sans perdre de vue leur identité religieuse.
En somme, le secteur éducation-formation de la fondation n’est pas seulement un choix, mais une réponse stratégique aux aspirations du Cheick et aux besoins de la communauté. Il s’agit de doter les générations futures des outils intellectuels, spirituels et éthiques pour qu’elles puissent non seulement s’épanouir individuellement, mais aussi contribuer activement à la construction d’une société juste et équilibrée.
Que compte faire la Fondation pour les écoles confessionnelles islamiques que l’Etat intègre progressivement au système éducatif formel ?
La Fondation Cheick Boikari Fofana considère l’intégration des écoles confessionnelles islamiques au système éducatif formel comme une opportunité essentielle pour renforcer la qualité et la reconnaissance de ces institutions. En ce sens, elle appuie les démarches et les efforts du COSIM dont ces écoles relèvent. Nous envisageons pouvoir soutenir certains des meilleurs élèves issus de ces écoles.
Comment sont financées les activités de la Fondation ?
Les activités de la Fondation Cheick Boikari Fofana sont financées par divers moyens pour assurer la pérennité de ses projets et de ses missions.
Voici les principales sources de financement. Il y a les dons et contributions de la communauté. La fondation reçoit des dons de membres de la communauté, de bienfaiteurs et de sympathisants qui souhaitent contribuer à la réalisation des projets inspirés par l’héritage du Cheick. Ces dons sont essentiels pour financer les activités éducatives, culturelles et sociales de la fondation.
Il y aura des campagnes de levée de fonds : des campagnes de fundraising seront organisées pour mobiliser des fonds autour de projets spécifiques, comme la construction du siège de la fondation, qui comprendra un amphithéâtre, des salles de formation, une bibliothèque multimédia et un espace de prière. Ces campagnes permettent de sensibiliser un large public et d’encourager des contributions ponctuelles et continues.
On compte établir des partenariats avec des organisations et des entreprises : La fondation cherche à établir des partenariats stratégiques avec des organisations locales et internationales, ainsi qu’avec des entreprises engagées dans la RSE (Responsabilité sociétale des entreprises). Ces partenariats peuvent inclure des financements, des dons en nature, ou encore des services qui soutiennent les projets de la fondation.
On compte aussi sur les subventions et financements publics ou internationaux : La fondation explore les opportunités de subventions proposées par des institutions publiques ou des fondations internationales qui soutiennent des projets éducatifs, culturels et communautaires. Ces fonds aident à financer des programmes à long terme et à étendre la portée de la Fondation.
Enfin, il y aura des événements et activités génératrices de revenus : En plus des dons, la Fondation organisera dans l’avenir des événements tels que des conférences, des formations payantes et des symposiums. Les recettes générées par ces activités sont réinvesties dans les projets de la fondation pour lui assurer une certaine autonomie financière.
Ces sources de financement permettent à la Fondation Cheick Boikari Fofana de développer des projets qui impactent durablement la communauté, tout en respectant les valeurs d’engagement et de bienfaisance qui étaient chères au Cheick.
Quels sont vos projets à court, moyen et long terme ?
La Fondation Cheick Boikari Fofana a établi une vision claire de ses projets à court, moyen et long terme pour concrétiser ses objectifs et assurer un impact durable sur la communauté.
A court terme (1-2 ans), il y aura l’organisation d’un colloque sur la paix : la Fondation Cheick Boikari Fofana prépare un colloque international d’envergure à Abidjan, dont l’ambition est de devenir un événement majeur sur la scène internationale. Ce colloque réunira, au cours du premier semestre 2025, des penseurs, des chercheurs, des cadres musulmans et des acteurs de la société civile du monde entier, pour un échange de haut niveau autour de la thématique : “La place de l’éducation islamique dans la promotion de la paix et de la stabilité en Afrique : perspectives du Cheick Boikari Fofana ». Ce colloque se déroulera sur une période de trois jours et vise à offrir une plateforme unique pour explorer et analyser la pensée et les actions du Cheick Boikari Fofana, tout en renforçant les réseaux entre intellectuels et leaders musulmans.
On prévoit le lancement de campagnes de levée de fonds : Pour soutenir des projets prioritaires, notamment la construction du siège de la fondation, la fondation mène des campagnes de financement afin de mobiliser des fonds et de sensibiliser un large public aux valeurs et aux missions de la Fondation.
Il y aura l’organisation de conférences et d’ateliers éducatifs : La fondation va lancer des événements tels que des conférences et des ateliers pour sensibiliser les parents, les enseignants et les jeunes sur l’importance de l’éducation et la préservation des valeurs islamiques dans un contexte moderne.
À moyen terme (3-5 ans), il est prévu la construction du siège de la fondation. La Fondation prévoit la construction de son siège qui comprendra un amphithéâtre, des salles de formation, une bibliothèque multimédia, et un espace de prière. Ce centre sera un lieu de formation, de rencontre et de partage pour toute la communauté.
Il faut ajouter à cela la création de programmes de bourses. Pour encourager les jeunes à poursuivre des études supérieures, la Fondation veut lancer un programme de bourses d’études destiné aux étudiants issus de familles modestes. Ces bourses couvriront les frais scolaires, et parfois les frais de logement et de subsistance.
On compte mettre en place de partenariats éducatifs. La Fondation souhaite collaborer avec des institutions éducatives locales et internationales pour développer des programmes de formation et de mentorat, destinés à renforcer les compétences académiques et professionnelles des jeunes.
À long terme (5 ans et plus), nous prévoyons plusieurs projets. Notamment le développement de programmes éducatifs intégrés. La fondation aspire à créer un modèle éducatif unique qui associe les enseignements islamiques à une formation académique et professionnelle de haut niveau; la promotion de la recherche et de la publication. La Fondation souhaite encourager la recherche en sciences islamiques, en éducation et en développement communautaire. À long terme, elle envisage de publier des travaux qui valorisent le patrimoine intellectuel islamique et les contributions de la communauté à la société; l’organisation d’un symposium international annuel. La Fondation souhaite organiser un symposium international qui réunira des experts en éducation, des leaders religieux, et des chercheurs pour échanger sur des sujets liés à l’éducation, la jeunesse et la place des valeurs islamiques dans le développement des sociétés modernes.
Grâce à cette vision, la Fondation Cheick Boikari Fofana veut s’assurer que ses actions aient un impact profond et durable, en honorant l’héritage du Cheick et en contribuant au développement des futures générations dans un esprit de foi, de connaissance et de service à la communauté.
La Fondation a organisé le samedi 26 octobre 2024 un panel sur le thème : « De l’inspiration à la réussite : Comment aider nos enfants dans leur parcours éducatif ?». Quels enseignements tirez-vous de cette rencontre ?
Nous voudrions profiter de cette tribune pour remercier toutes les personnes qui nous ont accompagnés dans ce projet. Nous en tirons plusieurs enseignements. Notamment l’importance de l’implication des parents et des éducateurs. Le succès éducatif des enfants dépend en grande partie du soutien et de l’engagement actif des parents et des enseignants. Les intervenants ont insisté sur la nécessité d’établir un partenariat solide entre Famille et Ecole pour créer un environnement propice à l’épanouissement des enfants, tant sur le plan académique que personnel.
Nous retenons qu’il faut adapter l’éducation aux valeurs et à l’identité des enfants musulmans. Il est important d’offrir aux jeunes une éducation qui respecte leurs valeurs islamiques et leur identité culturelle. L’objectif est de leur permettre de s’intégrer harmonieusement dans la société tout en restant fidèles à leurs convictions religieuses. Ce cadre éducatif devrait renforcer leur estime de soi et leur donner les repères nécessaires pour réussir dans un monde pluriel.
Concernant le développement des compétences uniques de chaque enfant, il est important de valoriser les talents individuels des enfants. Chaque enfant a des aptitudes et des intérêts uniques, et les parents et éducateurs doivent les encourager à développer ces compétences pour les motiver à exceller et à se sentir valorisés.
On a compris qu’il faut promouvoir une éducation équilibrée entre foi et ambition professionnelle. Il est nécessaire de montrer aux enfants qu’ils peuvent poursuivre de grandes ambitions académiques et professionnelles tout en restant fidèles à leurs valeurs religieuses. Les intervenants ont partagé des exemples inspirants de personnalités qui ont réussi tout en respectant leur foi, démontrant qu’il est possible de concilier aspiration personnelle et identité religieuse.
Enfin, il faut établir le dialogue intergénérationnel pour une meilleure compréhension des défis modernes. La rencontre a favorisé un dialogue constructif entre parents, éducateurs, et jeunes, permettant de mieux comprendre les défis actuels auxquels les enfants font face, notamment la pression sociale, les influences des réseaux sociaux, et les attentes académiques. Cet échange intergénérationnel a renforcé la compréhension et le soutien nécessaire pour accompagner les enfants avec plus de pertinence.
En conclusion, ce panel a mis en évidence l’importance de créer un cadre éducatif qui respecte et valorise les jeunes dans leur diversité, en combinant l’excellence académique et l’éthique islamique. Les participants sont repartis avec des stratégies concrètes pour mieux soutenir les enfants et leur permettre de s’épanouir pleinement, ce qui est en parfaite adéquation avec les valeurs et la mission de la Fondation Cheick Boikari Fofana.
Nomel Essis