Un, deux, trois, les chancelleries occidentales ont dit ceci. Quatre, cinq, six elles ont dit cela. Alassane Ouattara libère Simone Gbagbo, c’est la conséquence de la pression des ambassadeurs en poste à Abidjan. La CEI proclame le verdict des urnes en défaveur du candidat du RHDP du Plateau, c’est le fruit des démarches des chancelleries occidentales.
En fin de semaine dernière, de folles rumeurs ont affolé la toile selon lesquelles des hommes lourdement armés sont entrés en Côte d’Ivoire et s’apprêteraient à passer à l’attaque. Et des chancelleries auraient demandé à leurs ressortissants de faire des provisions alimentaires et d’éviter de mettre le nez dehors dans les rues d’Abidjan après 18h. Rien que des balivernes. La haute hiérarchie de la police nationale a dû monter au créneau pour faire des démentis et rassurer les populations angoissées.
Finalement, quel est le rôle des chancelleries dans un pays ? A quoi servent-elles ? Pourquoi en Côte d’Ivoire on leur attribue tant de pouvoir ? Pourquoi pour soulager leurs âmes en peine certains Ivoiriens se croient obligés de faire endosser par les chancelleries toutes leurs rêveries ?
C’est connu, un ambassadeur est d’abord et avant tout, un fonctionnaire qui représente son pays à l’extérieur. En tant que tel, il a pour mission essentielle et première de défendre les intérêts de son pays, de ses ressortissants et de servir de courroie de transmission entre son pays et le pays où il exerce. Il n’a pas vocation à se mêler des affaires intérieures du pays qui l’héberge. Autrement, on parlera d’ingérence dans des affaires qui ne le regardent pas. Tout ambassadeur qui « met sa bouche » dans ce qui ne le regarde pas court le risque de se faire expulser pour incident diplomatique. Les ambassadeurs qui ont été ainsi expulsés ne se comptent plus tant ils sont nombreux. C’est pourquoi, il est illusoire de croire que ce sont les ambassadeurs qui régentent la vie dans le pays où ils sont affectés. Ce n’est ni leur mission ni leur rôle. Ils ne sont que les yeux et les oreilles de leurs mandants. De là, à dire que c’est eux qui agissent en sous-marin pour amener les pouvoirs à prendre des décisions de gouvernance est une grossièreté que nombre d’Ivoiriens ont fini par avaler.
Les ambassadeurs sont des diplomates. Rien que des diplomates. Ils font plaisir à tout le monde. Ils ne se mettent personne à dos et disent à chacun ce qu’il a envie d’entendre, tant mieux si cela peut apaiser les inquiétudes. Ils parlent donc avec diplomatie en utilisant des formules apprises à l’école. Autant ils sont en phase avec l’opposition autant ils filent le parfait amour avec le pouvoir. Ceux qui ont intégré dans leur disque dur que ce sont les chancelleries occidentales qui feront leur travail d’opposant à leur place font une grave erreur d’appréciation. Le diplomate n’a pas d’ami. Il travaille avec celui qui peut protéger et garantir les intérêts de son pays. Cela ne changera pas aujourd’hui. Pour le reste, ce sont des causeries de bars et de cabaret qu’il faut savoir circonscrire et restituer dans leur cadre.
Traoré Moussa