Le prince héritier du Royaume d’Arabie saoudite, Mohamed Ben Salman (MBS), rêve grand pour le football dans son pays. Il s’est fixé pour attirer tous les grands footballeurs du monde sur les pelouses des stades du Royaume. « Mohammed Ben Salman veut faire du championnat saoudien l’un des dix meilleurs au monde dans les cinq prochaines années. L’Arabie saoudite dispose de moyens presque illimités. Elle a dix fois plus d’argent que le Qatar, qui a organisé la Coupe du monde 2022 et a attiré de nombreuses stars du football mondial, ou que les Émirats arabes unis. Il faut aussi rappeler que le club anglais de Newcastle United a été racheté par le fond saoudien », explique Lukas Aubin, directeur de recherches à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS) et spécialiste de géopolitique du sport.
Pour réussir ce pari, le maître d’œuvre de cette politique sportive, MBS ne lésine pas sur les moyens. L’Arabie saoudite s’est lancée dans une véritable opération de séduction pour attirer des grands noms du football mondial. Après Ronaldo, Benzema, Kanté et Koulibaly, le royaume vise d’autres têtes d’affiche, dont certains des meilleurs joueurs africains. Une stratégie souhaitée par le prince héritier Mohammed Ben Salman.
D’autres stars africaines, telles le Marocain Hakim Ziyech, le Gabonais Pierre-Emerick Aubameyang (Chelsea), l’Algérien Riyad Mahrez (Manchester City) et l’Égyptien Mohamed Salah (Liverpool, Angleterre), pourraient prochainement être de nouvelles cibles. Les Ivoiriens Séko Fofana de Lens et Franck Kessié de Barcelone sont sur la tablette des clubs saoudiens qui leur ont fait des propositions très alléchantes qui leur seront très difficiles de refuser.
Quatre clubs détenus à 75 % par l’État
Les quatre principaux clubs du royaume – Al-Nassr, Al-Ittihad, Al-Ahli et Al-Hilal – sont les plus actifs sur ce marché des transferts. Ils seront détenus très prochainement à 75 % par le Fonds d’investissement saoudien, autrement dit par l’État.
La stratégie saoudienne est donc multi-sectorielle, puisqu’elle consiste non seulement à se mettre sous le feu des projecteurs en multipliant les achats de stars du football – ce qui entraînera la retransmission de matches du championnat saoudien dans d’autres parties du monde et donc générera des droits télé – et en organisant des compétitions internationales, mais également en investissant dans le sport en Europe, via le rachat de clubs, et donc de pénétrer les économies européennes.
L’opinion publique favorable au projet de MBS
L’Arabie saoudite, qui est pays où le football est de loin le sport le plus populaire, ambitionne également de faire progresser ses nationaux au contact des stars, suppose Lukas Aubin. « L’Arabie saoudite va probablement être candidate à l’organisation de la Coupe du monde 2034, mais elle va essayer de se qualifier pour celles de 2026 et 2030. Son but sera d’avoir une sélection compétitive, au contraire du Qatar, éliminé au premier tour de son Mondial (trois défaites). Pour l’image, c’est important. »
En Arabie saoudite, cette stratégie voulue par MBS est plutôt favorablement accueillie par la population, comme le précise, sous couvert d’anonymat, cet Européen y travaillant dans le secteur sportif. « Si en plus de voir venir d’Europe des stars, avec les retombées économiques qui vont avec, les Saoudiens peuvent aussi bénéficier d’une libéralisation du régime, même très lente, ils vont approuver», soutient Lukas Aubin.
L’arrivée au pouvoir de MBS a donc donné un coup de fouet à la politique sportive du pays. L’Arabie Saoudite accueille aujourd’hui plusieurs grands évènements sportifs comme le Dakar, un Grand Prix de Formule 1, le circuit LIV en golf ou la Saudi Cup, la course hippique la plus richement dotée au monde avec ses 20 millions de dollars. Et bientôt, elle organisera la Coupe d’Asie de football (2027) et les Jeux Olympiques d’hiver en Asie (2030).
Nomel Essis avec Jeune Afrique