Le Directeur Général de la sodexam Jean Louis moulot était ce dimanche l’invité du « Magazine du Dimanche » sur RTI
Ci dessous, l’intégralité de ses échanges avec le journaliste.
Pourquoi une journée météorologique mondiale ?
La Journée météorologique mondiale a été instituée pour célébrer l’entrée en vigueur, le 23 mars 1950, de la Convention portant création de l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM), Agence spécialisée des Nations Unies pour la Météorologie.
Le thème cette année est l’Océan, le temps et le climat. Pourquoi ce thème ?
Ce thème a été choisi pour souligner les efforts que déploie l’OMM depuis plus de soixante-dix (70) ans afin de mettre en évidence les liens qui unissent l’océan, le temps et le climat au sein du système Terre. A l’instar des arbres, les océans captent les excès de chaleur émis par les activités humaines (gaz à effet de serre), contribuant ainsi à faire baisser la température de l’atmosphère.
Il correspond également au lancement de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030), qui vise à̀ encourager le lancement d’idées innovantes et transformatrices pour faire de l’océanographie une source d’informations à l’appui du développement durable.
La SODEXAM en tant qu’autorité nationale de la Météo, agit en faveur d’une meilleure connaissance du climat en Côte d’Ivoire et œuvre aux côtés des structures étatiques compétentes à une meilleure appropriation des problématiques liées à la préservation des océans notamment.
Comment la SODEXAM contribue – t – elle à la préservation de l’Océan ?
Les météorologues de la SODEXAM en charge de la météo marine effectuent des analyses et la surveillance de l’océan à travers des images satellitaires, dont les résultats servent aux études océanographiques et participent à différentes initiatives telles que l’adoption, en juin 2017, de la loi relative à l’aménagement, la protection et la gestion intégrée du littoral, l’existence de plusieurs institutions de formation et de recherche scientifique sur les océans et les zones côtières, la mise en place du plan POLLUMAR, plan dans lequel la SODEXAM est partie prenante, destiné à la lutte contre la pollution marine, l’existence du Programme National de Gestion de l’Environnement Côtier, enfin la mise en œuvre du Projet d’Investissement pour la Résilience des Zones Côtières Ouest-Africaines (WACA-ResIP) financé par la Banque mondiale sur la période 2018-2023, etc.
Des discussions entamées avec des partenaires techniques nous permettront d’installer prochainement des stations météo marines, sur tout le littoral ivoirien.
NB : Le littoral ivoirien couvre une superficie de 23 253 km2 soit 7% de la superficie de la Côte d’ivoire pour 566 km de long. A l’instar de la côte atlantique de l’Afrique, elle est riche en ressources naturelles, en biodiversité et en écosystèmes marins. Cependant, de nombreux facteurs naturels et humains tels que la pollution, le changement climatique ou la croissance démographique menacent un nombre important d’écosystèmes fragiles.
A propos de la SODEXAM
Créée par le Décret n° 97 228 du 16 avril 1997, la SODEXAM a pour
missions:
Météorologie nationale dont les activités détiennent la certification ISO 9001 version 2015 depuis juin 2020;
o Aviation Civile;
o Médecine Aéronautique et Aéroportuaire ;
Au niveau des installations météorologiques, nous disposons de :
o 13 stations synoptiques de référence dont 11 stations automatiques ;
o 99 stations agro météorologiques climatiques automatiques (SODEXAM et partenaires) ;
o 132 postes pluviométriques (dont 15 installés dans le District d’Abidjan).
Au niveau de la navigation aérienne, nous avons la gestion de :
• 15 Aérodromes opérationnels dont:
• 05 ouverts à la réception des vols commerciaux réguliers de la compagnie nationale: San Pedro, Bouaké, Odienné, Man, Korhogo
• Yamoussoukro réservé à des Vols officiels, privés et sert d’aérodrome de dégagement pour la compagnie nationale.
• Bondoukou, Sassandra, Ségué́la, Bouna, Dabou, Tabou, Gagnoa, Grand-Bé́réby ne disposent pas de services de Circulation Aérienne, mais procurent une Assistance aux vols à la demande.
Pour ce qui est de la médecine aéronautique nous avons le centre de médecine aéronautique et aéroportuaire qui délivre notamment les attestations de santé au personnel navigant et aux professionnels du secteur aéronautique.
A propos de la météorologie
Qu’est-ce que la météorologie ?
La météorologie est une science qui a pour objet l’étude des phénomènes atmosphériques tels que les nuages, les précipitations ou le vent dans le but de comprendre comment ils se forment et évoluent en fonction des paramètres mesurés tels que la pression, la température et l’humidité.
La météorologie moderne permet d’établir des prévisions de l’évolution du temps en s’appuyant sur des modèles mathématiques à court comme à long terme qui assimilent des données de nombreuses sources dont les stations, les satellites et les radars météorologiques.
La météorologie a des applications dans des domaines très divers comme les besoins militaires, la production d’énergie, les transports (aériens, maritimes et terrestres), l’agriculture, la médecine, la construction, l’assurance (classique, agricole), la Photographie aérienne ou le cinéma. Elle est également appliquée pour la prévision de la qualité de l’air.
En quoi la météorologie peut – elle être utile au développement d’un pays ?
A l’ instar des Agences météorologiques et hydrologiques nationales des 188 pays Membres de l’OMM, la SODEXAM en tant qu’autorité Nationale Météorologique a un rôle essentiel à jouer pour assurer l’adaptation des populations et des secteurs aux incidences des changements climatiques et pour atténuer ces incidences.
Parmi celles-ci , les plus graves sont celles qui risquent d’affecter l’homme et le développement socio-économique et de perturber les structures dont nous dépendons pour la nourriture, l’eau, le logement et les moyens de transport.
Aujourd’hui, tous les grands pays prennent en compte dans leurs processus de développement les secteurs d’activités dits « climato sensibles » :
– L’agriculture ;
– La santé (paludisme, 1ère cause de mortalité nationale) ;
– Les ressources en eau (barrages, assèchement de la nappe phréatique) ;
– La réduction des risques de catastrophe (inondation, éboulements, crue des fleuves).
Par exemple, de fortes précipitations peuvent favoriser la propagation de maladies et de parasites ainsi que l’érosion des srols et, selon le moment du cycle des cultures, se répercuter sur la production agricole.
Pour notre pays, dont le succès repose sur l’agriculture, la bonne appropriation du climat par les agriculteurs est un gage de succès. Car les semences, les récoltes et autres grandes étapes de production sont basées sur les saisons et les variations climatiques.
Outre l’agriculture qui est l’une des applications de la météo, les autres secteurs socio – économiques utilisent la météo pour accompagner la réussite de nombreux projets.
L’on peut citer notamment :
– Les Travaux Publics qui planifient leurs activités en fonction de la météo ;
– l’énergie notamment à travers la surveillance des barrages pour hydroélectrique pour une meilleure planification de la fourniture d’électricité. La conception et le dimensionnement des barrages à partir de la pluviométrie existante. Ces données permettront d’assurer la viabilité de ces gros investissements ;
– la sécurité et la défense notamment pour la planification de déplacements, l’utilisation d’aéronefs et autres opérations d’envergure ;
– les transports terrestre, maritime et aérien. La sécurité routière (congestion, visibilité), incidence sur l’économie nationale. Navigation des bateaux, assistance des pêcheurs.
– la santé, car la météo permet d’anticiper sur la survenue d’épidémies et de maladies liées au climat. Dans le cas de la COVID 19, l’OMM a réuni en avril 2020, ses experts pour plancher sur un lien éventuel entre le climat et l’augmentation du nombre de cas dans les pays affectés.
En un mot, les répercussions des conditions météorologiques, climatiques, hydrologiques et environnementales sont importantes et vont s’amplifiant.
Les avantages socio – économiques de la météo ?
– 30% du Produit Intérieur Brut (PIB) des pays développés est climato sensible à ces conditions. Ce taux est souvent encore plus élevé dans les pays en développement.
– Des études internationales révèlent que les bénéfices économiques sont 10 à 40 fois supérieurs aux investissements réalisés dans les Systèmes de météo nationaux.
– La modernisation des services météorologiques en Côte d’Ivoire pourrait permettre d’améliorer le PIB.
– C’est le lieu pour moi de rappeler que la SODEXAM est bénéficiaire du Projet de Vigilance Climatique et Météorologique (VIGICLIM), fruit d’un accord de prêt conclu entre la Côte d’Ivoire et l’Agence française de développement (AFD), d’un montant de 28 millions d’euros, soit 18,4 milliards de FCFA.
– Grâce au projet VIGICLIM, la Côte d’Ivoire sera doté :
o de 18 nouvelles stations météo passant de 13 à 31 (à raison d’1/région) ;
o d’1 Centre National de prévisions et d’alerte moderne,
o d’1 centre régional d’étalonnage et de maintenance des équipements météo,
o d’1 radar météorologique d’une couverture de 250 km de rayon.
o d’1 plan de renforcement des capacités des experts.
– Remerciements au PR et au Ministre de Tutelle
Quelles attitudes faire adopter aux populations pour préserver les océans ?
Eviter de jeter des déchets dans la mer ;
Eviter la pêche abusive ;
Eviter la pollution des eaux par les rejets industriels.
Faut – il s’inquiéter des effets du changement climatique ?
En Côte d’Ivoire, sur la période allant de Janvier à Décembre 2020, les valeurs de température mensuelle (de 24,8°C à 28,4°C) ont été au-dessus de la moyenne.
o En somme, sur la période allant de Janvier à Décembre 2020, la température moyenne annuelle enregistrée en Côte d’Ivoire a été de 26,6°C, soit une hausse de +0,9°C par rapport à la période moyenne sur près de 30 ans qui est de 25,7°C et une baisse de -0,1°C par rapport à l’année 2019 (26,7°C).
Nous avons donc connu plus de chaleur en 2020 qu’en 2019 et la tendance continue vers une augmentation des températures.
Les conséquences de ces élévations de température sont les inondations, l’érosion côtière, qui deviennent des phénomènes récurrents dans notre pays.
Quelle est la fiabilité des données météo ?
Au plan mondial 90%.
En CI, 83 % qui sera amélioré grâce au Projet VIGICLIM.
Explications sur la vague de chaleur précédente
– Les mois de Février et Mars sont les mois les plus chauds en Côte d’Ivoire avec des températures maximales supérieures à 37°C pour la ville d’Abidjan.
– Une zone de forte chaleur a été constatée sur l’Afrique du nord et le sud-ouest Sahel sur la période du 8 au 15 mars 2021.
– Les températures restent au-dessus de la moyenne climatique au Nord et au Centre-Nord de la Cote d’Ivoire.
– Durant les mois de Février et Mars, le rayonnement solaire est quasi direct et le ciel peu nuageux sur la Côte d’Ivoire. Ce rayonnement ajouté à la circulation atmosphérique favorise des élévations de température sur la Côte d’Ivoire. Ces fortes chaleurs seront aussi régulées par les pluies orageuses qui ont lieues sur le pays.
– Ainsi en fonction de la position géographique des villes, elles ont connu des rayonnements solaires relativement différents.
A propos des Perspectives climatiques pour la saison des pluies allant
de Mars à Juin 2021 en Côte d’Ivoire
– La prévision saisonnière est le fruit d’un consensus fait autour des sorties des modèles des grands Centres Climatiques Mondiaux et des connaissances sur la variabilité climatique en Côte d’Ivoire.
– La SODEXAM a participé par visioconférence, du 22 au 26 février 2021, au 8ème forum régional des Prévisions Saisonnières des caractéristiques agro-hydro-climatiques pour les pays du Golfe de Guinée (PRESAGG-08) organisé par le Centre Régional AGRHYMET, le Centre Africain pour les Applications de la Météorologie au Développement (ACMAD) et leurs partenaires.
– A l’issue, des prévisions saisonnières agro-hydro-climatiques ont été élaborées pour ces pays pour la saison des pluies allant de Mars à Juin 2021. Et, l’analyse de la situation en Côte d’Ivoire donne les résultats suivants pour la période allant de Mars à Mai (MAM) 2021 :
o Au Nord de la Côte d’Ivoire, il est attendu des cumuls pluviométriques moyens saisonniers proches de ceux des normales saisonnières variant entre 200 et 270 mm (normal) ;
o Au Centre ivoirien, il est attendu des cumuls pluviométriques moyens saisonniers de plus de 280 mm (normal);
o Au Sud et au littoral de la Côte d’Ivoire, des cumuls pluviométriques saisonniers de plus de 400 mm sont attendus (excédentaires, vigilance). Ces cumuls sont proches de ceux des moyennes saisonnières de 400 mm (1981-2010).
NB: les prévisions saisonnières ci-dessus sont des profils attendus. Des mises à jour mensuelles seront effectuées en fonction de l’évolution des paramètres climatiques.
Face aux risques d’inondation
Au regard des cumuls pluviométriques moyens ou supérieurs attendus dans certaines zones au Sud du pays et des probabilités d’occurrence d’évènements pluvieux intenses, des inondations sont très probables au niveau des bassins où une situation normale à excédentaire est attendue. Pour réduire le risque sur les personnes et les biens, il est recommandé de :
– Renforcer la communication des prévisions saisonnières et la sensibilisation des communautés exposées, en impliquant les plateformes de réduction des risques de catastrophe ;
– prévenir l’occupation anarchique des zones inondables, en particulier dans les agglomérations urbaines,
– renforcer la veille et les capacités d’intervention des agences en charge du suivi des inondations, de la réduction des risques de catastrophes et des aides humanitaires,
– assurer le curage régulier des caniveaux d’assainissement.
Face aux risques de maladies
Pour réduire le risque de maladies liées à l’eau (Cholera, malaria, dengue, bilharziose, diarrhée, etc.) dans les zones humides ou inondées, il est fortement recommandé de :
– vacciner les populations et les animaux, encourager l’utilisation de moustiquaires, mettre en place des stocks d’antipaludéens notamment dans les zones difficiles d’accès en cas d’inondation ;
– suivre la qualité de l’eau et mettre en place des produits de traitement ;
– sensibiliser sur les maladies climato-sensibles, en collaboration avec les services de météorologie, d’hydrologie et de santé ;
– renforcer les capacités des systèmes nationaux de santé et des plateformes de réduction de risques de catastrophes